Armée de terre - Les centres d'entraînement de Mailly
La décision d’implanter à Mailly un ensemble de centres d’entraînement par la simulation résulte de la convergence de plusieurs facteurs : tout d’abord la nécessité pour les armées modernes d’adapter les moyens d’entraînement au nouveau contexte géopolitique, les exercices classiques dans les camps et en terrain libre ne suffisant plus à un entraînement complet d’unités modernes ; ensuite, l’apparition de technologies nouvelles, qui rend possible le vieux rêve de disposer d’instruments permettant d’évaluer selon des critères non contestables le résultat des actions tactiques menées dans un environnement complexe, et notamment de sanctionner toute décision et de faire connaître les pertes ; enfin, la nécessité de réduire les coûts de l’entraînement sans en diminuer l’efficacité.
C’est à partir du même constat que l’armée américaine s’est doté depuis quelques années de centres d’entraînement où il est fait usage dans des conditions optimales des moyens de simulation destinés à la préparation opérationnelle des états-majors et des unités.
Le passage à titre expérimental d’unités françaises dans ces centres et la participation d’états-majors à des exercices « arbitrés par ordinateurs » ont démontré le bien-fondé de ce nouveau concept d’entraînement et incité l’État-major de l’Armée de terre (EMAT) à étudier son application dans l’armée française. Cette étude a abouti à la création à Mailly de deux centres complémentaires aux missions bien spécifiques.
Le centre d’entraînement des PC
Créé le 1er septembre 1993, il a pour rôle d’entraîner d’une part les PC de division et de régiment, d’autre part les cadres du Cours supérieur d’état-major et de l’École d’état-major à la conception et à la conduite de manœuvres interarmes dans une situation aussi réaliste que possible.
La conception même du centre permet aux « joueurs » (états-majors de division et de régiment en particulier) de s’entraîner avec leurs moyens organiques de commandement et de se roder aux techniques d’état-major : utilisation des procédures, connaissance du processus de prise de décision, développement de la cohésion et de la coordination entre les diverses cellules.
Le logiciel choisi pour équiper le centre est le système américain Brigade, battalion, battle System (BBS), qui est utilisé aux États-Unis pour entraîner les commandants de brigade et de bataillon. Il a toutefois été adapté aux besoins de l’armée française pour en accroître le réalisme.
Le centre dispose d’installations spécialisées : un centre de simulation ; un centre d’implantation des PC régimentaires ou centre d’entraînement opérationnel ; l’implantation du PC de division est possible en déploiement tactique sur le terrain de manœuvre ou dans un bâtiment spécialement aménagé.
Aux ordres d’un directeur aidé d’un petit état-major, le centre est articulé en trois ensembles : une direction des exercices chargée de l’élaboration des thèmes, de la coordination et de la préparation des « analyses après action » ; une direction de l’animation coordonnant les actions ennemies et représentant l’échelon supérieur et les voisins ; un ensemble système et transmissions chargé de la simulation et des liaisons.
La montée en puissance du centre s’étalera jusqu’en septembre 1995. Une année de mise en œuvre et d’expérimentation est nécessaire pour former les personnels, maîtriser l’emploi du système et mettre au point le fonctionnement général. La capacité du logiciel et la présence de cadres permanents au centre permettront une interprétation fiable des résultats de chaque exercice et donc la possibilité pour les joueurs d’évaluer leur degré de préparation opérationnelle, et pour l’armée de terre de recueillir de nombreuses données utiles à l’évolution de la doctrine et des équipements.
Le centre d’entraînement au combat
Sa conception, proche de celle des centres d’entraînement américains comme celui de Hohenfels par exemple, permettra le passage chaque semaine de deux sous-groupements blindés ou mécanisés avec leurs matériels organiques.
L’efficacité du centre repose sur trois piliers :
• Un ensemble de simulateurs de tir de combat interactifs reliés à un Centre d’analyse et de recueil de données (Cared). Ces simulateurs de conception française permettront une représentation réaliste des armes à tir tendu et de celles à effet de zone (artillerie, mines…) et le suivi des résultats des actions tactiques sur l’ensemble de la zone de manœuvre (environ 12x10 kilomètres). Ces matériels devraient être interopérables avec les matériels équivalents destinés à équiper en particulier l’armée allemande.
• Une équipe d’observateurs, arbitres, conseillers, dont le rôle sera de régler les éventuels litiges, mais surtout de recueillir au cours de l’exercice les informations concrètes nécessaires pour argumenter les séances « d’analyse après actions » prévues après chaque phase de combat.
• Une force adverse manœuvrante et suffisamment puissante pour mettre en difficulté les joueurs et les obliger à utiliser au mieux tous les moyens mis à leur disposition.
La montée en puissance du centre s’étalera de 1995 à 1997. Cette période permettra la mise au point des matériels nécessaires, la construction du Cared et le développement des méthodes pédagogiques adaptées à ce moyen d’entraînement nouveau.
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La création de ces deux centres ne va pas seulement améliorer les conditions d’entraînement des forces en mettant à leur disposition deux organismes spécialisés supplémentaires, elle va en changer la conception même. Leur colocalisation à Mailly permettra ultérieurement d’envisager le développement de nouveaux types d’exercices combinant la simulation numérique tactique d’actions fictives et le jeu réel de troupes sur le terrain avec simulateurs de tir de combat. La décision de doter l’Armée de terre de ce système moderne lui permettra de disposer d’un atout important en Europe. ♦