Armée de terre - Carnéade (Combat aéroterrestre représenté numériquement pour les études, l'aide à la décision et l'entraînement)
La simulation du XXIe siècle
Capable de gérer un nombre important de paramètres, la simulation permet par la modélisation des systèmes d’armes ou des schémas décisionnels d’obtenir une représentation, la plus fidèle possible, des opérations militaires par des hypothèses ou des environnements donnés.
La complexité des grands systèmes, le coût et les difficultés de mise en œuvre imposent à l’Armée de terre le recours aux simulations. C’est pourquoi elle s’est résolument engagée dans des études de développement de son propre système de simulation afin d’accroître son autonomie de réflexion, de conception et d’évaluation.
Un développement exploratoire du système Carnéade (1), proposé en 1990, avait pour objectif de réaliser et d’expérimenter un démonstrateur. Faisant largement appel à des automates, celui-ci modélisait l’engagement d’une division blindée française face à une division de même nature sur un théâtre Centre-Europe. Il doit désormais évoluer pour répondre aux besoins nouveaux engendrés par les bouleversements stratégiques. Ainsi l’État-major de l’Armée de terre (EMAT) et le Service technique des systèmes d’information et d’électronique (STSIE) ont prévu la réalisation en 1995 d’un autre démonstrateur qui, dans l’optique de la projection de forces, permettra l’optimisation de la constitution d’une force opérationnelle terrestre.
Élargissement des champs d’application
L’évolution de la réflexion opérationnelle, traduite dans l’instruction générale sur l’emploi des forces terrestres et dans les premières études « Armée de terre XXI », amène à penser qu’un élargissement des champs d’application du système Carnéade s’impose, en particulier pour la représentation et le cadre d’emploi des forces terrestres.
La modélisation de la manœuvre implique la prise en compte des niveaux opératif et tactique et des différentes phases d’une opération militaire (préparation, recherche du contrôle, maîtrise de la situation, réorganisation) ainsi que l’étude de toutes les fonctions opérationnelles (commandement, renseignement, agression, mobilité, soutien…). Le combat d’une force terrestre est la résultante d’actions mettant en œuvre toutes les fonctions opérationnelles, à tous les niveaux, en cohérence avec une manœuvre d’ensemble qui recherche la destruction ou la neutralisation d’un adversaire, ou encore la réalisation d’une opération de maintien ou de rétablissement de la paix.
Des scénarios opérationnels génériques et schématiques, illustration modélisable de ceux du Livre blanc, représentent les nouveaux cadres d’emploi des forces terrestres (action de sûreté, contrôle du milieu, action dans la profondeur…). Ces différentes formes d’engagement couvrent un large éventail d’actions allant de la faible à la forte intensité, qui ne sont exclusives, ni totalement indépendantes les unes des autres, du fait de leur éventuelle simultanéité.
Évolution des besoins militaires
Carnéade avait pour but de constituer un moyen d’études technico-opérationnelles. De nouveaux objectifs, autrefois secondaires, doivent être pris en compte : entraînement des états-majors de grandes unités et de groupements, formation tactique des officiers stagiaires de l’Enseignement militaire supérieur ; aide à la planification opérationnelle et élaboration des plans d’emploi ; simulation avant l’engagement de plusieurs manœuvres pour fournir une aide à la prise de décision grâce aux résultats de plusieurs confrontations simulées.
Certaines limites peuvent apparaître dans la modélisation du facteur humain. Des coefficients peuvent prendre en compte des facteurs tels que le stress ou la fatigue des hommes, mais il est difficile de modéliser l’impact des chefs sur la troupe et des réactions « non conformes » de l’adversaire, ce qui implique de rester prudent sur les résultats des confrontations.
À l’instar de l’armée américaine qui développe WARSIM 2000 (système de simulation pour le XXIe siècle), l’Armée de terre française va prochainement acquérir son propre système répondant aux besoins d’entraînement, d’études et d’aide à la décision.
Au cœur des Systèmes d’information et de communication (SIC), Carnéade est donc destiné à permettre aux décideurs de comprendre différentes situations, de les confronter, d’anticiper les actions des adversaires et ainsi de concourir à la réussite de la mission. ♦
(1) Philosophe grec du IIe siècle av. J.-C, fondateur du probabilisme et acronyme de « Combat aéroterrestre représenté numériquement pour l’étude, l’aide à la décision et l’entraînement ».