Marine - Les forces maritimes européennes
La seule véritable force maritime européenne existant à l’heure actuelle est la toute récente Euromarfor, à côté de laquelle existent deux forces bilatérales, la force navale franco-allemande et la force amphibie anglo-néerlandaise.
Euromarfor
Le 15 mai 1995 a été signé, à Lisbonne, l’acte de naissance de deux forces européennes, l’Eurofor – force opérationnelle rapide –et l’Euromarfor, force maritime européenne.
Un peu d’histoire
La signature des textes fondateurs de ces deux forces, appelées à opérer ensemble ou de façon indépendante, est l’aboutissement d’une réflexion engagée en 1992. La France, l’Espagne et l’Italie, à l’occasion de l’exercice Farfadet 92, annonçaient, par la voix des trois ministres de la Défense, leur volonté commune d’étudier la constitution d’une force aéromaritime européenne préplanifiée. Dès le mois de novembre, un premier document de travail, élaboré par la cellule de planification de l’UEO, était mis en discussion.
Le projet fut relancé un an plus tard, à l’occasion de l’exercice Ardente, et l’Italie proposait qu’une force terrestre d’intervention rapide lui soit couplée. Depuis cette date, les deux projets ont fait l’objet de nombreuses discussions et, après l’exercice Tramontana en novembre 1994, les ministres de la Défense des trois pays ordonnaient d’achever les études pour aboutir à la signature de Lisbonne, le 15 mai 1995. À cette occasion, le Portugal décidait d’adhérer à l’accord, devenant membre associé, mais non fondateur, d’Euromarfor. De son côté, la Grèce a marqué son intérêt pour la force navale, mais son adhésion n’est pas encore officialisée.
L’Euromarfor, pour quoi faire ?
Favoriser la création d’une identité européenne de défense autour d’une composante navale susceptible d’être engagée dans des activités décidées par les institutions politiques, tel est l’objectif visé par l’Accord de Lisbonne.
Les missions susceptibles d’être confiées à l’Euromarfor correspondent aux objectifs fixés par l’UEO, formulés dans la « Déclaration de Petersberg », en application des principes arrêtés à Maastricht. Il s’agit de missions humanitaires ou d’évacuation de ressortissants menacés, de missions de maintien de la paix ou de combat pour la gestion des crises ou le rétablissement de la paix. À cela s’ajoutent des missions secondaires comme la présence, la recherche de renseignements ou le contrôle du trafic marchand.
Constituée de bâtiments désignés par chacun des pays parties à l’accord, cette force de réaction prépranifiée sera tenue à un niveau d’alerte convenable et activée à la demande. Elle permettra de disposer, pour chaque type d’opération envisagée, des unités les plus appropriées, y compris, si nécessaire, des porte-aéronefs et des bâtiments amphibies. Son champ d’action n’est pas limité au seul théâtre méditerranéen.
En dehors de ses périodes d’activation pour mission réelle, la force poursuivra un entraînement propre à valider son aptitude opérationnelle. Dans tous les cas, sa constitution est de nature à manifester ostensiblement la volonté européenne de défense et la réalité d’un « pavillon UEO ».
Cette force commune, qui sera déclarée « force relevant de l’UEO » par les pays concernés lors de la réunion ministérielle de novembre, reste ouverte aux autres membres de cette alliance, et doit permettre à l’Europe de disposer d’une capacité navale propre, ce qui n’exclut pas qu’elle puisse être employée au sein de l’Otan. Une déclaration dans ce sens sera faite à la prochaine réunion du comité militaire. Elle s’inscrit dans l’esprit de la « déclaration de Maastricht » de décembre 1991, qui stipule que « l’UEO sera développée en tant que composante de l’Union européenne et comme moyen de renforcer le pilier européen de l’Alliance atlantique ».
Cette double déclaration illustre bien qu’entre les structures de l’Otan et celles d’une défense européenne, il ne doit pas y avoir concurrence mais complémentarité : il s’agit d’un côté de consolider et d’amplifier les acquis opérationnels, en faisant au besoin appel aux procédures de l’Otan, et de l’autre de veiller à l’organisation du contrôle politique des opérations que l’UEO peut être amenée à décider.
L’Euromarfor en pratique
L’Accord de Lisbonne prévoit une structure permanente légère, pouvant être renforcée en cas d’activation.
Alflot a été désigné comme premier commandant de force, Comeuromarfor. Ce commandement s’exerce pour un an et par roulement entre Cecmed, Cincnav (Italie) et Alflot (Espagne). La participation du Portugal à ce tour de commandement est encore à l’étude.
Dès septembre 1995 sera constituée, auprès des autorités ainsi désignées, une cellule d’état-major permanente, pour l’instant réduite à un officier. Cette formule pourra être adaptée avec l’expérience compte tenu, en particulier, de la participation du Portugal et de celle, encore incertaine, de la Grèce.
En cas d’activation d’Euromarfor, ces structures seront renforcées, notamment par un commandement tactique, baptisé Comtaceuromarfor, désigné par un comité interministériel de haut niveau, où siègent les représentants des autorités politiques et les chefs d’état-major des armées des nations parties à l’accord.
La première année de l’Euromarfor sera une année de mise en place de l’organisation et de « rodage », qui devrait se terminer par la participation de cette force à un exercice majeur organisé par l’Italie, Éole 96.
Les forces bilatérales
La Force navale franco-allemande (FNFA)
C’est une force qui a maintenant quatre ans d’existence. Elle est organisée sur le principe d’une force activée sur ordre, sans état-major permanent (on call force). Elle a été activée quatre fois pour entraînement, alternativement sous contrôle opérationnel allemand ou français. Elle est composée « en fonction des disponibilités et des missions » ; elle peut être élargie, d’un commun accord, pour intégrer des unités d’autres États-membres de l’UEO ou de l’Otan, au cas où une telle demande serait formulée.
Sur décision des deux gouvernements, la FNFA peut être activée (hors périodes d’entraînement) pour exécuter des missions bilatérales, pour être mise à la disposition d’une organisation internationale de sécurité (Otan-UEO), pour remplir un mandat de l’Onu ou de l’OSCE. La zone d’entraînement ou d’action n’est pas limitée. La France souhaite que cette force soit déclarée comme relevant de l’UEO.
La force amphibie anglo-néerlandaise
Sur la base d’un accord passé en 1973 entre gouvernements, les deux marines ont bâti une force de débarquement intégrée (UK-NL amphibious force). Elle comporte du côté britannique la 3e brigade commando des Royal Marines et, du côté hollandais, un bataillon. Les moyens maritimes associés sont définis en fonction de l’opération envisagée.
Cette force a été déclarée force « relevant de l’UEO » par les États fondateurs, ce qui veut dire qu’ils acceptent de la mettre à la disposition de l’UEO si cette alliance le demande, mais se réservent au cas par cas la possibilité de refuser. ♦