Marine - Silam : une nouvelle conception de l'administration et de nouvelles méthodes de travail
C’est dans une précédente rubrique, en février 1994, que le système informatisé local de l’administration des marins (Silam), développé par le commissariat de la marine, avait été présenté aux lecteurs de la revue Défense Nationale. En phase de développement depuis le 1er octobre 1994, le procédé d’intégration Silam des unités autonomes (grands bâtiments et unités à terre) s’est achevé en octobre 1996. L’heure est donc venue non seulement de dresser les premiers bilans et de consolider les résultats obtenus, notamment grâce aux méthodes d’audit et de contrôle de gestion, mais aussi d’esquisser l’avenir.
Le Silam gère désormais la solde et les frais de déplacement des quelque 65 000 appelés, engagés et personnels de carrière de la marine nationale. Sa mise en place a constitué une avancée importante dans la voie de la modernisation de l’administration de la marine, amorcée depuis de nombreuses années, en particulier grâce à l’introduction de l’informatique dans les formations administratives. Elle a aussi été relativement peu onéreuse puisque, d’un montant de 18 millions de francs, l’investissement a été amorti en seize mois seulement, d’une part grâce aux gains de productivité rendus possibles par l’accroissement de ces mêmes moyens informatiques et par la rationalisation de l’organisation et des procédures de traitement de la solde, d’autre part grâce à la forte implication du personnel d’administration dans cette modernisation.
En effet, le Silam se présente comme une organisation à trois niveaux : formations administratives, centres interunités locaux d’administration des marins (Cilam) et centre informatique du commissariat (CIC) dont dépend le centre informatique d’administration de la solde (CIAS).
Les formations informent le personnel sur toute question relative à la solde grâce à un disque optique numérique. Elles constatent les droits à la solde, recueillent et vérifient les pièces justificatives et, après apposition d’un code à barres renfermant le numéro matricule du marin, les transmettent au Cilam dont elles dépendent.
Les Cilam, au nombre de six (Brest, Paris, Cherbourg, Lorient, Rochefort et Toulon), regroupant au total 230 personnes, traitent ces informations relatives à la solde et aux frais de déplacement, allégeant ainsi d’environ 50 % les tâches antérieurement accomplies par les formations. Après traitement, les informations sont transmises au CIC/CIAS par l’intermédiaire du réseau de transmission des données de la marine (RTDM). Le CIAS enfin calcule et paie la solde du personnel militaire de la marine.
Le Silam ne remet donc pas en cause le rôle des bureaux administratifs des formations. En revanche, il les décharge des tâches qui peuvent être effectuées et centralisées au Cilam du port de rattachement au moyen de matériels informatiques performants. Cette organisation rationalise le traitement de l’information, diminue les risques d’erreurs, permet des économies d’échelle substantielles et garantit une interprétation unique de la réglementation relative à la solde et aux frais de déplacement à Toulon, Brest ou Papeete. L’intégration au Silam (Cilam de Brest) des unités outre-mer a en effet parachevé l’œuvre entreprise en 1993 et nécessité une attention particulière en raison de l’éloignement de ces unités de la métropole, de leur dissémination sur toute la surface du globe et de leur diversité (éléments navals ou unités à terre).
C’est également le travail quotidien des fourriers, personnel équipage et officier marinier chargé de l’administration, que le Silam a modifié. Les fourriers sont désormais appelés à alterner affectations dans les unités administratives et dans les Cilam : dans ceux-ci, où ils sont soumis à un plan de formation rigoureux (fiches de tâches, fiche professionnelle individuelle régulièrement mise à jour permettant de connaître le niveau de qualification atteint) et astreints à une rotation régulière entre les différents postes de traitement ; dans les unités, où la polyvalence et l’expérience acquises dans ces centres leur permettra de renseigner les administrés et de vérifier avec rigueur les informations transmises au Cilam.
Cette variété d’affectations et d’expériences professionnelles est complétée par la formation acquise au contact des techniques bureautiques les plus modernes, mais aussi par l’application des méthodes d’audit et de contrôle de gestion aujourd’hui en vigueur dans l’ensemble des Cilam. L’audit s’insère en effet dans l’activité et le suivi des centres, qu’il s’agisse d’audit interne ou externe. Le contrôle interne des Cilam repose sur le bureau « organisation et méthodes » créé dans chaque centre. Ce bureau est compétent pour traiter toutes les difficultés liées à l’application de la réglementation et à l’appréciation des situations individuelles complexes (il instruit en particulier les recours des administrés concernant l’administration financière) ; il tient le tableau de bord du Cilam (indicateurs de coût, d’activité, d’« alarme », exploités depuis janvier 1995 par la direction centrale du commissariat, et bientôt indicateurs de performance et de qualité des prestations) ; il contrôle les conditions de fonctionnement du centre (organisation, équipements, informatique, formation du personnel) ; il vérifie les opérations de traitement et la satisfaction des droits des administrés. Ces opérations de contrôle interne complètent celles qui, dans les unités, sont accomplies par le commissaire et portent sur la validation des documents transmis au Cilam.
Le contrôle externe est assuré par la direction centrale du commissariat de la marine (mission « organisation-audit-gestion ») avec le concours du CIC, lors des missions d’audit annuelles qui ont pour objet de s’assurer de l’homogénéité structurelle et fonctionnelle des Cilam et de l’existence d’une unité dans l’interprétation de la réglementation. Ces missions sont effectuées par une équipe comprenant des commissaires, des officiers mariniers fourriers et un spécialiste des questions et techniques informatiques. Les domaines d’investigation sont les suivants : organisation et fonctionnement, efficacité du contrôle interne, qualité de l’informatique (y compris sécurité et sûreté du système et des données). Ce contrôle externe s’effectue aussi en continu, sur pièces et à distance, grâce aux tableaux de bord que les Cilam transmettent à la direction centrale. Par ailleurs, des réunions Silam semestrielles rassemblent les représentants de la direction centrale du commissariat et ceux des Cilam.
La mise en place du Silam a été réalisée en un laps de temps assez court (trois ans et demi), s’agissant d’une structure de gestion de la solde d’une population diversifiée et très mouvante. La phase de « montée en puissance » étant achevée, il est nécessaire d’envisager maintenant l’avenir du Silam. Celui-ci est appelé à évoluer selon deux axes de progrès : le contrôle de gestion et le pilotage d’une part, le projet relatif au système intégré de la solde sur les moyens informatiques du commissariat (Sismic) d’autre part.
Depuis 1994, en effet, la marine a décidé la mise en place progressive de techniques modernes de contrôle de gestion. Pour le commissariat de la marine, cette démarche se traduit notamment par l’instauration d’un dialogue avec le chef d’état-major de la marine. Ayant pour finalité d’améliorer le processus de décision et d’éclairer les arbitrages financiers, le contrôle de gestion consiste, pour le Silam, à déterminer des objectifs à partir de l’analyse de la situation existante, à mettre en place les plans d’actions permettant de les atteindre et à déterminer des indicateurs mettant en lumière les résultats obtenus. Les premiers indicateurs de performance et de qualité des prestations des Cilam répondent déjà à ce souci.
Le projet Sismic consiste, quant à lui, à déterminer les droits concernant la rémunération dès la saisie au sein des Cilam. Le contrôle de cohérence sera réalisé dès la validation des informations et non plus au CIAS. Sismic devrait donc permettre d’améliorer la qualité de l’administration (rapidité de prise en compte des éléments d’information relatifs à la solde, correction immédiate des erreurs) et d’augmenter ainsi la productivité des Cilam. Il est organisé à partir d’une base de données relationnelle comprenant elle-même une base historique, une financière et une ou plusieurs statistiques. Sismic, projet interne à la marine prévu pour entrer en service à la fin de 1998, pourra sans difficulté s’insérer ultérieurement dans le logiciel interarmées de calcul de la solde, dont la mise en place a été confiée au comité de coordination des commissariats par le ministre de la Défense.
Un groupe d’études et de développement interarmées de la solde (Gedis) a ainsi entamé ses travaux le 1er septembre 1996. Il est chargé de rédiger un référentiel commun (aux trois armées et à la gendarmerie) de détermination des droits à la solde. À cette fin, il doit recenser l’ensemble des textes et dispositions existant en la matière au sein du ministère de la Défense, puis proposer les harmonisations interarmées nécessaires à la rédaction d’un mémento commun de la solde. Après cette phase commencera, à la fin du premier semestre 1997, la définition du système informatique interarmées de calcul de la solde qui devrait être mis en œuvre à l’horizon 1999-2000.
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C’est donc toute l’administration de la solde dans la marine qui a entamé, depuis 1993, une mutation qui peut se résumer en trois mots : modernisation, efficacité, rationalisation. Elle n’a été possible que grâce à la capacité d’adaptation et à la détermination de son personnel administratif qui, en remettant en question ses méthodes de travail, a su relever le défi de l’innovation. ♦