La position des États-Unis dans le monde est à certains égards paradoxale.

Grâce à des initiatives opportunes, grâce aussi à des circonstances favorables qu’ils ont réussi à exploiter, ils apparaissent aujourd’hui plus puissants qu’ils ne l’ont jamais été et maîtres du jeu international. Parmi les initiatives opportunes : celles qu’a prises Richard Nixon, conseillé par Henry Kissinger, à l’égard de Moscou et de Pékin au cours des années 1972 et 1973 ; parmi les circonstances favorables : la crise énergétique provoquée par la décision des producteurs de pétrole de quadrupler le prix du brut. Les initiatives ont permis aux États-Unis de sortir de l’ornière vietnamienne, de normaliser leurs relations avec Pékin et Moscou et d’avoir à nouveau les mains libres pour agir. L’augmentation du prix de l’énergie a permis aux États-Unis de ressouder en un ensemble cohérent des alliés qu’inquiétait — qu’inquiète encore — la politique monétaire et économique des États-Unis. C’est ainsi que les pays consommateurs de pétrole, dans l’impossibilité d’équilibrer leur balance des paiements en raison du coût de l’énergie importée, légitimement inquiets des risques d’embargo en cas de nouvelle flambée au Proche-Orient, ont accepté l’invitation qui leur était adressée en janvier 1974 par le Président Nixon de constituer un groupement des pays consommateurs.

Réticente, pour des raisons compréhensibles compte tenu de sa politique antérieure, la France se trouvait isolée. Il lui était impossible de se dissocier de ses partenaires européens qui, pour leur part, estiment qu’il n’est ni possible ni souhaitable de définir une politique énergétique dans le cadre des Neuf sans les États-Unis et le Japon. De la sorte, il fallait bien trouver un compromis qui permette à la France de sauvegarder la solidarité communautaire tout en conservant une position indépendante qui lui permette de poursuivre ses initiatives tendant à instaurer un dialogue euro-arabe et une coopération préférentielle entre les deux rives de la Méditerranée.