Le tour d’horizon que fait l’auteur des pays gagnés ou tentés par un processus de réforme politique profonde en 2011 révèle une forte tendance à la bipolarisation idéologique pour les uns, une difficile reconstruction nationale pour d’autres, une contestation brutale ou larvée chez les derniers. L’an II confirme l’instabilité généralisée du monde arabo-musulman.
L’an II du « Printemps arabe »
The Second Year of the “Arab Spring”
The overview which the author makes of the countries won or tempted by the process of profound political reform in 2011 reveals a strong tendency towards ideological bipolarization for some, a difficult national reconstruction for others, a brutal or latent contestation still for others. The second year confirms the generalized instability of the Arab-Muslim world.
«Paradoxe significatif : lors des révolutions arabes pacifiques pour la plupart, les groupes violents se sont activés, parallèlement au courant de la colère pacifique », Abdelhamid Quandil, al-Quds, 27 mai 2012.
Quel bilan, peut-on faire du « Printemps arabe », deux années après la « révolution du jasmin », qui le déclencha ? Les jeunes acteurs, qui engagèrent le processus du changement en Tunisie, en Égypte, en Libye et au Yémen, remirent en cause les pouvoirs autoritaires et optèrent pour un régime de bonne gouvernance, mettant à l’ordre du jour, la justice sociale, la dignité et la démocratie. Fait d’évidence, les establishments de transition, chargés en principe d’engager l’institutionnalisation démocratique, en Tunisie et en Égypte, opèrent pour la réalisation de leurs projets de sociétés. En Libye et au Yémen, la guerre civile met en scène des mouvements contre-révolutionnaires et des oppositions ethniques et tribales.
La bipolarisation idéologique en Tunisie et en Égypte
Le régime qui s’est établi en Tunisie, suite aux élections du 23 octobre 2011, assure l’hégémonie du parti islamique En-Nahdha, renforcé par les deux partis civils alliés avec lui dans la troïka. D’ailleurs, la praxis gouvernementale et les options défendues par ses représentants à l’Assemblée constituante révèlent son souci de faire valoir l’identité musulmane. Des groupes islamistes tentent de mettre en application la théocratisation. En Égypte, les élections égyptiennes ont donné le pouvoir, dans cette conjoncture postrévolutionnaire, au parti islamique qui engagea également une théocratisation rampante. Des milices agissent comme auxiliaires des « Frères musulmans » (1). Confirmant sa victoire, le président Mohamed Morsi a annoncé le 22 novembre des dispositions qui élargissent tous ses pouvoirs. L’opposition crie au putsch et voit en lui « un nouveau pharaon ». Les observateurs estiment que le président Morsi établit désormais le régime islamique (2). Le vote hâtif d’une constitution, adoptant les options islamistes, le 30 novembre, par l’Assemblée, devait confirmer les options du Président. Fut-elle contestée par le mouvement démocrate, la constitution dénoncée fut l’objet d’un référendum, le 15 décembre, qui confirma la démarcation idéologique. Notons cependant que les sociétés civiles tunisiennes et égyptiennes restent mobilisées. La population civile tunisienne, à l’appui de l’opposition démocrate, s’est engagée pour défendre le projet de société moderniste. En Égypte, de grandes manifestations populaires expriment l’opposition aux velléités despotiques du président Morsi.
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