Editorial
Éditorial
La géographie fait l’histoire, on le sait. Celle de la France d’abord. La construction européenne fut la réponse à des siècles de tragédies militaires traduisant la précarité stratégique de peuples européens que la géographie ne parvenait pas à fixer ; mais elle n’a pas encore su transcender cette nécessité vitale en idéal politique partagé et en ambition collective.
La perspective méditerranéenne a su conforter la France dans ses racines et lui offrir une fenêtre sur une Afrique du Nord et une Asie de l’Ouest avec lesquelles elle entretenait des affinités ; mais elle n’a pas encore trouvé de cadre adapté à cette vocation ancienne. L’ouverture océanique sur l’Atlantique a permis à la France de s’inscrire dans l’universel de la planète et des échanges et de valoriser, en les raccordant, ses outremers à la métropole ; l’ONU la symbolise où la France est active en défendant ses valeurs et sa vision d’ensemble ; mais reste à structurer la défense de ses intérêts, notamment à protéger les flux maritimes d’échanges qui conditionnent sa prospérité et à façonner son engagement dans la stabilité mondiale.
De cela qui dessine la carte de nos invariants stratégiques, le Livre blanc a bien évidemment traité. De même que des nécessaires outils militaires qui requièrent un niveau d’investissement exigeant en ces temps de disette budgétaire. Le débat sur notre stratégie de sécurité nationale est plus que jamais vital. Il y va de notre avenir. N’annonce-t-on pas des conflits sur le sol d’une Europe dont la densité se délite ? Parlons de la communauté de destin et d’intérêts des peuples d’Europe et de leurs responsabilités collectives. Parlons vrai.
La géographie a façonné aussi de bien curieux ouvrages à valeur stratégique, des îlots ou des pivots qui sont comme autant de môles assiégés ou de plateformes qui polarisent la puissance et focalisent les enjeux de défense : de Gibraltar à Suez, Djibouti ou Malacca, de la Manche à Panama, à Formose et aux routes de l’Arctique ; mais aussi de l’Écosse à Kaliningrad, au Qatar ou à Singapour en passant par la Suisse. Là sont des microsystèmes stratégiques dont l’examen révèle les ressorts de postures militaires originales qui nous concernent.
Le territoire national reste le cœur des préoccupations de sécurité du pays et l’insécurité, réelle comme ressentie, est l’objet de tous les soins des forces d’ordre qui en ont la charge. C’est le cas de la Gendarmerie nationale dont le maillage du territoire constitue plus que jamais la garantie de la sécurité et de la tranquillité publiques. Sa qualité militaire reste un atout.
La promotion « Général de La Fayette » de l’École de Guerre a choisi de réfléchir et de témoigner ; c’est ainsi que pas moins de sept stagiaires s’expriment ici sur des thèmes variés témoignant d’une vraie curiosité et d’un réel engagement dans la défense du pays. Le général Poirier récemment disparu et dont les textes publiés ont été rassemblés dans un Cahier d’éloge (souscription p. 136) trouvera, n’en doutons pas, dans cette génération de brevetés la postérité capable de faire face aux défis militaires de ce siècle. ♦