L’auteur interroge la notion de revue de questions internationales et de défense, et en redéfinit la fonction politique et sociale à l’heure de l’aplatissement de l’Internet.
Des revues, pour quoi faire ?
Journals, why make them?
The author questions the notion of international review and defense issues, and redefines the social and political function at the time of the grounding of the Internet.
Chaque temps est ressenti par ceux qui le vivent comme extravagant : on se croit toujours confronté à une époque formidable, en tous sens du mot, appelant analyses et approfondissements neufs. La nôtre n’échappe pas à la règle. On peut pourtant plaider que la déconstruction du monde en cours depuis vingt ans – elle porte certes en elle une reconstruction, mais laquelle ? – interpelle avec une particulière violence concepts et pratiques des relations internationales. Le temps exigerait donc un renforcement des capacités d’analyse et non leur dissolution dans le « grand tout » de l’universelle conversation d’Internet. À la recherche de définitions de la puissance, d’équilibres redéfinis, de modes de gouvernance, c’est-à-dire de normes de cohabitation entre communautés humaines, adaptées à notre temps technique, culturel, idéologique, économique, la réflexion sur l’international semble bien revêtir aujourd’hui une pertinence particulière.
International et défense : des espaces orphelins
En France, la recherche sur l’international ou la défense s’intègre vaille que vaille dans un « grand mou » disciplinaire dont nombre de rapports ont échoué à nous faire sortir. Les lieux de réflexion sur l’international (institutions, revues…) se sont construits contre le mainstream universitaire. C’est particulièrement vrai pour la réflexion de défense : réputée peu honorable dans les années 1970, naissante et déjà ghettoïsée dans les années 1980, contestée dans les années 1990 au nom de la pacification générale du monde, revivifiée par le 11 septembre 2001, sous une forme paranoïaque et conceptuellement désorganisée, puis écartelée entre une modernité séduisante et les remugles de la contre-insurrection…
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