Appliquée au Moyen-Orient, la réflexion sur l’incertitude menée par l’auteur conduit à s’intéresser aux faits porteurs d’avenir et aux stratégies d’apprenti-sorcier, les premiers comme indicateurs réduisant celle-ci et les seconds comme perturbations l’amplifiant dangereusement.
Les stratégies militaires en question
Military strategies in question
Applied to the Middle East, reflection on the uncertainty driven by the author led to looking at the facts and promising strategies by the sorcerer’s apprentice, of which the former are seen as indicators in reducing the latter, and the latter as perturbations that are amplifying dangerously.
Je souscris sans réserve aux propos que le général Henri Paris consacre dans cette même livraison à « L’incertitude en matière de stratégie militaire » et que je résume ainsi : la fin des « grandes guerres » du XXe siècle n’est pas la paix ; les « petites guerres », de la guérilla aux guerres insurrectionnelles et au terrorisme, multiplient les incertitudes politiques et stratégiques ; pour gérer l’imprévisible, il faut conserver les infrastructures militaires polyvalentes, héritages vivants des traditions de la nation française. Comme ses remarques correspondent à mes propres convictions, j’ai choisi de les illustrer en suivant les schémas d’une démarche prospective appliquée aux guerres du Moyen-Orient. Entre le passé et le futur de ce théâtre spécifique, quels sont les « faits porteurs d’avenir » du temps présent, quelles sont les incertitudes parmi les stratégies gagnantes susceptibles de déboucher sur des règlements acceptables et des situations pacifiées ? En revanche, quelles seraient les conséquences de scénarios catastrophiques, de ces stratégies « d’apprentis sorciers » qui pourraient provoquer le retour des pires événements des dernières décennies ? Une rapide évocation du passé lointain rappellera d’abord les constantes géographiques, historiques et culturelles liées à ce passionnant théâtre.
Les guerres du Moyen-Orient
Une histoire millénaire, les plus anciennes civilisations, le berceau des religions monothéistes ; d’innombrables conflits entre les peuples, contre les envahisseurs ou du fait de satrapes ou de religieux fanatiques, telles sont les fondations de la région. Au XIXe siècle, sous l’Empire ottoman, la région est stratégique pour l’Empire britannique des Indes. Au début du XXe, le pétrole devient un enjeu majeur pour les États-Unis. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la région est à l’abri des grands combats, mais, en mars 1945, le « Pacte du Quincy » entre Roosevelt et Ibn Saoud consacre la volonté des États-Unis d’y être présents en force. En 1948, la création de l’État d’Israël
suscite l’opposition initiale des Anglo-Saxons ; mais l’aide militaire française et les succès de nos matériels témoignent de notre sincère amitié. Plus encore, notre aide en matière nucléaire – la bombe et son vecteur – longtemps tenue secrète, consacre une véritable complicité.
Mais elle s’estompe dans les décennies suivantes et lors des « grandes guerres », les Six-Jours, le Kippour, Paix en Galilée… et des « petites guerres » entre Israël et les Palestiniens. Le terrorisme, les deux Intifadas, le Liban, Gaza, la « Loi du Talion » impliquent Tsahal autant que le Mossad et le Shin Beth. Et puis, de 1980 à 1988, la guerre Iran-Irak, est le dernier, le plus long et l’un des plus meurtriers des conflits majeurs de la guerre froide.
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