L’achat de drones américains comble une lacune identifiée mais ne doit pas masquer une conjoncture européenne très favorable à la définition, au développement et à la mise en œuvre d’un drone polyvalent d’observation de moyenne altitude et longue endurance, largement à la portée industrielle et opérationnelle des Européens.
L’achat du Reaper, une chance pour l’Europe
The purchase of Reaper, an opportunity for Europe
The purchase of U.S. drones fills an identified gap but should not obscure a European conjuncture that is very favorable to the definition, development and implementation of a versatile observation drone of medium altitude and long endurance—largely the industrial and operational scope of Europeans.
Le titre pourrait choquer plus d’un lecteur si, derrière la décision du ministre de la Défense d’acquérir deux drones américains Reaper pour le théâtre malien, ne se cachaient en réalité un signal politique fort et une belle ouverture pour l’industrie aérospatiale française. Les lignes qui suivent ont pour ambition, après avoir évoqué l’historique du dossier des drones de moyenne altitude et de longue endurance (MALE), de rappeler l’intérêt de s’en procurer, de montrer que l’Europe dispose des capacités pour lancer son propre programme et enfin d’indiquer en quoi la décision ministérielle doit être interprétée comme le rejet d’une nouvelle rupture capacitaire en matière de drones et, dès lors, comme un encouragement adressé aux industriels pour faire éclore une capacité manufacturière autonome et ambitieuse.
Un signal politique fort
Le 11 juin 2013, le ministre annonce l’acquisition de deux drones américains Reaper, avec la perspective d’acquérir ensuite dix autres vecteurs, soit quatre systèmes en tout (un système est en règle générale constitué de trois vecteurs et d’une station sol), qui pourraient être également des Reaper mais pas nécessairement, revenant ainsi sur la décision du gouvernement précédent qui avait préféré le Heron TP israélien ; quel que soit le système, il doit être en effet « francisé » pour circuler au-dessus du territoire français. Les réactions sont nombreuses pour défendre le tissu industriel français et en appeler à la souveraineté nationale. Mais y avait-il vraiment une meilleure solution ? Pour se convaincre du contraire, faisons un rapide retour en arrière sur l’épineux dossier des drones MALE.
Après le retour d’expérience du Piver en service dans l’Armée de terre dès 1992, l’Armée de l’air opte en 1997 pour le Hunter, fruit d’une coopération entre l’américain Northrop Grumman et l’Israélien Israeli Aircraft Industries (IAI). Opérationnel en 2001, il s’agit d’un drone de surveillance tactique aux performances limitées qui permet aux aviateurs d’acquérir du savoir-faire opérationnel. Son retrait du service en 2004, en raison du coût élevé de sa maintenance, entraîne une rupture capacitaire de quatre années jusqu’à l’arrivée du Système intérimaire de drone MALE (SIDM), baptisé Harfang par la suite.
Il reste 85 % de l'article à lire
Plan de l'article