L’auteur fait le tour des enjeux des révoltes arabes, plus de trois ans après leurs déclenchements et examine les chances des camps initialement en présence pour observer la fluidité des frontières doctrinales et des postures politiques, et la volonté de beaucoup de trouver pour le moment une forme de statu quo.
Conséquences stratégiques des révolutions arabes : bilan géopolitique à somme nulle ?
Strategic consequences of the Arab revolutions: a zero-sum geopolitical balance?
The author tours the issues of Arab revolts, more than three years after their beginnings, and examines the opportunities for initially opposing camps to observe the flow of doctrinal boundaries and political positions, and the will of many at the moment to find some form of status quo.
Alors que le processus de « révoltes arabes » est désormais entré dans sa quatrième année, qu’il n’est pas encore achevé et qu’il pourrait sembler prématuré de tenter d’en dresser un bilan, quelques réflexions sur les évolutions géopolitiques qu’il a amenées s’avèrent pourtant opportunes au moment où la confusion la plus totale semble s’imposer en Libye, en Syrie voire en Égypte.
Jusqu’à l’irruption de ces révolutions, nous nous trouvions face à une configuration relativement simple : d’un côté, des pays majoritairement sunnites et « pro-occidentaux » (1), du moins au niveau de leurs dirigeants, avec quelques réfractaires à l’hégémonie américaine et européenne (Algérie, Soudan, voire Libye) ; et de l’autre côté, trois États sous influence chiite bien que très hétérogènes (Liban, Syrie, Irak) et fortement arrimés à la nouvelle puissance montante et perturbatrice du Moyen-Orient, l’Iran, constituant un nouveau « front du refus », soutenu plus ou moins discrètement et sincèrement par quelques pays émergents ou ré-émergents comme la Russie et la Chine.
Les révoltes arabes, processus que l’on préférera à celui de révolutions (qui supposent que soient associées conjointement liberté, égalité, fraternité) (2), ont dans un premier temps été assimilées à un échec de la politique occidentale dans la région puisque ce sont surtout ses alliés qui ont été mis en difficulté (Égypte, Tunisie, Bahreïn, Yémen) et on a pu s’inquiéter d’un basculement favorable à l’« axe chiite » lorsqu’en février 2011, Le Caire autorisa le passage de navires de guerre iraniens par le canal de Suez, au grand dam d’Israël. Mais, la révolte syrienne, qui surgit en mars 2011, plus tardive, plus violente et plus incertaine a redistribué les cartes, puisque la chute à terme du dernier régime baasiste, à dominante alaouite (une branche dissidente du chiisme), serait un coup dur pour Téhéran et ses alliés, à défaut d’être décisif. Par ailleurs, les régimes islamistes ou leurs successeurs qui ont émergé à l’issue des consultations démocratiques en Afrique du Nord ne sont pas aussi systématiquement antiaméricains qu’on pourrait le penser de prime abord, phénomène qu’il conviendra d’analyser.
Il reste 87 % de l'article à lire
Plan de l'article