La fin des régimes autoritaires établis sur base minoritaire ne signifie pas pour autant la possibilité du développement de projets de réaménagement des États postcoloniaux sur des bases communautaires. Le Levant va continuer à être un objet malmené par le jeu des puissances.
Du Levant d'hier au Levant de demain
From the Levant of Yesterday to the Levant of Tomorrow
Ending authoritarian minority regimes does not of itself mean that there is common accord on developing projects for rebuilding post-colonial states. The Levant will continue to be mishandled as a result of power games.
Le vieux monde se meurt. Le nouveau monde tarde à paraître. Et dans ce clair-obscur, les monstres surgissent. Cette belle phrase d’Antonio Gramsci vient immédiatement à l’esprit de celui qui observe les mutations d’envergure qui affectent le Levant d’aujourd’hui. Sous les effets conjugués de l’invasion anglo-américaine de l’Irak de 2003 et des révolutions arabes enclenchées en décembre 2010, le Levant, tel que nous le connaissons, est en train de disparaître et de céder la place à un nouveau Levant dont les contours demeurent extrêmement incertains, même si toutes les tendances lourdes qui se dégagent ne peuvent qu’inciter au pessimisme.
À l’heure où l’on commémore le centième anniversaire du déclenchement de la Première Guerre mondiale, il y a lieu de se demander si les désintégrations actuelles au Levant ne représenteraient pas en quelque sorte l’ultime acte d’un très vieux problème, celui de la difficile succession de l’Empire ottoman, suite à son effondrement il y a près d’un siècle.
Un Levantin d’aujourd’hui ne peut que se retrouver dans la vision lucide et désespérée qui fut exprimée par Stefan Zweig dans Le Monde d’hier, le très émouvant livre-testament dans lequel il déplorait la disparition d’une certaine Europe, celle, pluriethnique et pluriculturelle, de la Vienne et de l’Empire austro-hongrois d’avant 1914. Zweig écrivait : « Cette pestilence des pestilences, le nationalisme, a empoisonné la fleur de notre culture européenne ».
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