La Grande Guerre, en s’inscrivant dans la durée, a profondément modifié le lien entre les autorités politiques et le haut commandement français, avec un contrôle accru au fil du conflit, du Politique sur le chef militaire. Cette évolution imposée par la conduite des opérations et la mobilisation générale de toutes les ressources du pays mérite d’être à nouveau analysée, d’autant plus que certaines leçons tirées restent aujourd’hui pertinentes
Politiques et militaires, 1914-1918
Policy and Military, 1914-1918
The Great War, while being maintained over time, profoundly changed the link between political authority and French high command, with growing control over policy and conflict placed on the head of the military. This evolution, imposed by the conduction of operations and the general mobilization of all the resources in the country, merits a new analysis, especially since certain lessons remain pertinent today.
Par un de ces curieux paradoxes dont l’histoire cultive le secret, c’est dans sa propre patrie que Clausewitz s’est trouvé trahi par les agissements du haut commandement impérial allemand, notamment sous l’égide de Ludendorff qui, loin de subordonner son action aux directives du pouvoir politique, lui a imposé ses propres vues, souvent sources de catastrophes d’ailleurs. En France, a contrario, le commandement a, en toutes circonstances au cours de la Grande Guerre, scrupuleusement respecté l’adage cicéronien. Cela ne veut pas dire pour autant que les relations entre le commandement et le pouvoir furent toujours sans nuages, bien au contraire.
Ces relations – parfois ambiguës – que le commandement a entretenues avec le pouvoir politique peuvent être caractérisées par, du côté du commandement, une recherche permanente d’une autonomie maximale, tandis que le pouvoir politique s’est toujours efforcé de contrôler le commandement, même en allant jusqu’à des interventions qui outrepassaient ses attributions.
À cet égard, la période de la guerre peut être divisée en trois phases : la première correspondant au commandement de Joffre qui pourrait se définir par une mésentente cordiale entre le commandement et le pouvoir, suivie par une ère de flottements au cours de l’« année trouble » 1917, avant d’aboutir sous la rude poigne de Clemenceau à un équilibre, sanctionné par la Victoire.
Il reste 91 % de l'article à lire