Après l'effondrement américain en Indochine et devant les incertitudes qui pèsent sur l'avenir de cette région, Tokyo manœuvre en souplesse et rééquilibre ses rapports en Asie du Sud-Est de façon à sauvegarder des positions économiques importantes pour son industrie. La même attitude prudente peut être notée dans les relations de Tokyo avec Pékin et Moscou tandis que le Japon se préoccupe de l'avenir de la péninsule coréenne et qu'il obtient, au prix de contreparties que l'on aperçoit, confirmation de l'engagement américain en Extrême-Orient.
Le Japon et l'après-Vietnam
Les « dominos » du Sud-Est asiatique tiendront-ils ? Quel sera le poids de la puissance militaire et, à plus long terme, économique du Vietnam dans la péninsule indochinoise et au-delà ? Quelles seront les relations de l’U.R.S.S. et de la Chine avec le Vietnam et quelle sera leur place dans les autres pays de la région ? Quelle extension prendra le retrait de la présence américaine dans le Sud-Est asiatique ? Dans quelles conditions s’effectuera-t-il ? Quel sera le redéploiement de la stratégie américaine en Extrême-Orient et singulièrement en Asie du Nord-Est et à Taïwan ?
Telles sont quelques-unes des questions que le monde se pose après le changement de pouvoir à Saïgon, à Phnom Penh et à Vientiane. Ces questions, le Japon les ressent avec une acuité particulière. Géographiquement, en effet, il est proche de la péninsule indochinoise et ses liens avec les États de la région sont nombreux et étroits. Mais il constitue aussi un élément important du dispositif stratégique américain en Extrême-Orient et plus particulièrement en Asie du Nord-Est. Enfin, il est depuis plusieurs années en négociation avec les deux principaux alliés d’Hanoï, la Russie et la Chine, pour définir ses relations avec eux. Aussi, la réflexion que suscite à Tokyo la fin du conflit indochinois dépasse-t-elle largement le cadre de l’Asie du Sud-Est pour toucher également à la place du Japon vis-à-vis des États-Unis en Extrême-Orient et à ses rapports avec ses deux grands voisins communistes.
Depuis la deuxième guerre mondiale, l’engagement politique du Japon en Asie du Sud-Est est resté très limité. Sans doute faut-il voir dans cette prudence autant le peu de goût des Japonais pour les prises de position tranchées que leur préoccupation de discrétion pour éviter de réveiller dans la région les souvenirs de la seconde guerre mondiale. Il convient d’ajouter que les rares initiatives que le Japon a prises ces dernières années ne l’ont pas placé en position favorable vis-à-vis des nouveaux maîtres de la péninsule indochinoise.
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