Le levain de la liberté : les totalitarismes et l’Église au XXe siècle
Inventaire des persécutions endurées par l’Église chrétienne au XXe siècle et des efforts, souvent héroïques, des chrétiens pour y faire face, ainsi pourrait être résumé l’ouvrage de Denis Lensel, journaliste spécialisé dans ce douloureux sujet. Le livre aborde trois domaines distincts : la politique antichrétienne des États totalitaires (nazis et communistes) ; l’intégrisme islamique ; le matérialisme occidental.
Le premier domaine est circonscrit. De Staline à Khrouchtchev et Brejnev, l’Église russe a beaucoup souffert, et peu résisté. Les prudences de Pie XI et Pie XII vis-à-vis du régime nazi et les attitudes diverses des chrétiens allemands nourrissent encore un triste débat. En Chine, au Viêt-nam et à Cuba, des pouvoirs en sursis poursuivent, mais avec moins d’ardeur, la lutte antireligieuse. Partout en régime communiste, l’État a tenté, non sans succès, de s’assurer d’une contre-Église dont les clercs chantaient, d’une même voix, la gloire de Dieu et celle du parti.
Les deux autres sujets abordés n’ont pas la cohérence du premier. L’intégrisme islamique est en effet une autre catégorie : non plus lutte antireligieuse, mais imposition par la violence d’une religion exclusive. Le matérialisme occidental, enfin, est présenté ici comme totalitarisme. Cette charge demande explication : c’est que l’auteur centre sa réflexion sur la « culture de mort » qui dominerait notre société, à la fois hédonisme et mépris de la promesse de vie qui germe au ventre de la femme. Sans doute la participation personnelle de Denis Lensel à la conférence que l’Onu a tenue à Pékin en 1995 sur la condition féminine n’est-elle pas étrangère à ce parti pris sélectif. Sans mésestimer le caractère suicidaire de la « culture de mort », on eût aimé que l’auteur relevât, dans notre civilisation postmoderne, quelques autres traits tout aussi inquiétants. ♦