L’Inde, en tant que puissance militaire, peut se définir par sa dimension historique, géopolitique ou industrielle et pas seulement par son ordre de bataille ou encore les multiples conflits auxquels elle a participé. Mais ce qui la caractérise depuis quelques années c’est sa capacité à se moderniser, pour répondre aux menaces internes et externes auxquelles elle fait face.
L’Inde : puissance militaire ?
India: A Military Power?
India, as a military power, can define itself by its historical, geopolitical, or industrial dimension, not only by its order of battle or even the multiple conflicts it has participated in. But that which has characterized India for years has been the ability to modernize in order to respond to the threats, internal or external, that face it.
Depuis son indépendance, l’Inde, en tant que puissance militaire, doit concilier menaces internes et externes. L’influence coloniale britannique a bien sûr formaté son outil militaire ainsi que celui du Pakistan (1). À peine formées, les deux nouvelles armées nationales s’opposèrent de 1947 à 1948 durant la première guerre du Cachemire (2). Cette première opposition influence encore les structures et la stratégie des armées indiennes. L’Inde n’a pas d’alliés immédiats à proximité et cherche de plus en plus à forger des alliances régionales ou internationales. Ses voisins, le Népal ou le Bhoutan n’ont pas les moyens d’être des puissances. Le Myanmar (qui subit l’influence de la Chine également active au Pakistan) et l’Iran (qui a son propre calendrier régional) bien que limitrophes ne sont pas des alliés militaires. Et s’il s’agit avant tout de faire face au Pakistan moderne (deux tiers des moyens militaires sont utilisés en ce sens), l’Inde doit désormais réorienter son organisation militaire par rapport à la Chine, les deux pays ayant même été en guerre en 1962.
Le paradoxe de cette opposition étant que la Chine est aussi le premier partenaire commercial de l’Inde, ce qui ne contribue pas pour autant à simplifier leurs intentions réciproques (3) et dimensionne les capacités militaires indiennes. Pour la seule Armée de terre indienne, la création sur sept ans d’un nouveau corps de troupe de montagne devant à terme comporter 90 000 hommes a été annoncée début 2014, avec un budget lissé de 10,6 milliards de dollars. L’Inde et la Chine ont en commun 3 380 kilomètres de frontières, dont certaines portions sont toujours contestées, avec de nombreuses incursions de l’Armée populaire de libération (APL) chinoise sur le territoire indien, voire des occupations temporaires. Si la zone frontalière Ouest, en partie contestée par le Pakistan, est située à haute altitude dans l’Himalaya, la zone Nord-Est, moins développée et touchée par le mouvement insurrectionnel maoïste Naxalite, est moins élevée avec notamment des vallées fluviales (4). Cette dernière se situe dans les États dits tribaux enclavés entre le Bangladesh, le Bhoutan, le Myanmar et la Chine (5).
Fin septembre 2014, le nouveau Premier ministre indien, Narendra Modi, s’est rendu en visite officielle aux États-Unis pour encourager des partenariats économiques et stratégiques entre les deux pays, comme développer en commun de nouveaux matériels de défense, renouveler le pacte de défense et aborder la question nucléaire. Si les États-Unis et l’Inde se rapprochent, ils ne sont pas des alliés naturels et leurs relations sont circonstanciées. Ainsi celle-ci, non alignée, se refuse à isoler la Russie dans la crise ukrainienne et n’a appliqué, sous pression, les sanctions contre l’Iran que récemment. Elle cherche à diversifier ses sources de matériels militaires et à varier ses alliances politiques en fonction de ses besoins face à la Chine. Non seulement les deux pays massent des troupes de chaque côté de la frontière, mais construisent des infrastructures de transport et de défense (bases aériennes, missiles, radars) (6).
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