La Chine est la puissance du XXIe siècle, avec ses forces et ses faiblesses. L’Empire du Milieu est complexe, multiforme et difficile à comprendre. Entre volonté de restaurer une puissance perdue et gérer une croissance interne déséquilibrée, Pékin est confrontée à des défis géants alors que les faits et gestes du régime sont scrutés avec attention et méfiance.
Chine : puissance montante ?
China: A Growing Power?
China is a 21st century power with its strengths and its weaknesses. The Middle Empire is complex, multiform, and difficult to understand. Between the desire to restore its lost power and handle an imbalanced internal growth, Beijing is confronted with enormous challenges, and so the facts and actions of the regime are under careful and suspicious scrutiny.
Le 16 mars 2005 paraissait dans Les Échos un article signé de Wu JianMin, présenté comme « la réponse d’un Chinois » à un livre qui venait de paraître, Quand la Chine change le monde (1). M. Wu, francophone et ancien interprète de Mao, a été porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois, ambassadeur à Paris, puis a dirigé « l’université chinoise de la diplomatie » avant de devenir président du Bureau international des expositions. Ce que dit ce remarquable agent d’influence de son pays au sujet de la puissance chinoise est très éclairant : « Jusqu’en 1820 environ, la Chine était la première puissance économique du monde ». Et quand Erik Izraelewicz cite un propos entendu à Pékin sous le sceau de l’anonymat : « Si le XIXe siècle a été pour la Chine celui de l’humiliation, le XXe celui de la restauration, le XXIe sera celui de la domination ». Wu répond : « L’idée de domination est contraire à la culture chinoise cinq fois millénaire. Pendant près de quinze siècles, alors que la Chine détenait presque tous les atouts technologiques et militaires, les Chinois n’en ont pas profité pour dominer le monde ».
Aujourd’hui, la réussite économique de la Chine en a fait, dans ce domaine, la deuxième puissance mondiale. On comprend que cela puisse donner à ses dirigeants et à son peuple l’envie de ne pas être que « l’usine du monde » et de tenir, sur le plan militaire et stratégique, une place qui soit du même niveau.
Tout n’est pas si simple. Il est tout à fait faux de dire que « l’idée de domination est contraire à la culture chinoise ». Toute l’histoire du pays est basée sur la volonté de prééminence d’un Empire central entouré d’une couronne de vassaux. Cette vision persiste encore très largement. Mais, au-delà des contrées vassales, le monde était peuplé de « Barbares », avec lesquels on ne voulait pas se commettre. Aujourd’hui, les vassaux ne payent plus le tribut et les rapports avec les Barbares sont devenus obligatoires. Il en résulte une difficulté à se positionner. La Chine a une volonté de suprématie régionale, qui demeure une constante de l’inconscient collectif. Elle est en train de découvrir qu’elle compte aussi au niveau mondial et qu’elle a probablement une position à tenir au-delà de son périmètre historique.
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