Editorial
Éditorial
Les attentats qui ont endeuillé la France en janvier illustrent dramatiquement le lien étroit qui unit notre pays avec le monde arabe. C’est la résultante d’une histoire séculaire commencée il y a bien longtemps autour de la Méditerranée, Mare Nostrum, et qu’il faut donc assumer. L’oublier ou le nier serait de fait désastreux pour comprendre les enjeux et les défis auxquels nous sommes confrontés. Dès lors, tous les bouleversements qui touchent l’espace sud-méditerranéen et le Levant nous concernent directement telles les vagues déferlantes frappant inexorablement les rivages à la suite d’un tsunami.
Le paradoxe actuel est aussi dans la confusion des temps. Ici, le temps politique et médiatique exige des réponses rapides et répondant aux besoins de communication, alors que les mouvements tectoniques en cause s’inscrivent dans un temps long aux racines anciennes, vieilles de plusieurs siècles comme l’antagonisme Sunnites-Chiites, complexes, comme les rivalités tribales et passionnelles, comme l’instrumentalisation du fait religieux le prouve.
De ce fait, il était essentiel pour la RDN de revenir sur la question, ou plutôt les questions des printemps arabes, quatre ans après le début de révoltes parties de Tunisie et remettant violemment en cause des régimes que l’on croyait immuables. Il est cependant trop tôt pour dresser un bilan objectif, alors qu’à l’inverse, les interrogations sont désormais multiples, avec l’effondrement de certains États et la recomposition des espaces géographiques, notamment au Levant. De plus, l’implosion de la Libye a créé un vide stratégique et donc sécuritaire, cristallisant tous les dangers, tant vers les pays limitrophes – eux-mêmes en recherche de stabilité comme la Tunisie et l’Égypte – que vers l’Afrique subsaharienne, déjà endémiquement fragile.
Certes, la RDN ne prétend pas à travers ce numéro, proposer une approche exhaustive du sujet, mais il importe de poursuivre l’analyse stratégique des conséquences de ces printemps, tant elles affectent notre propre sécurité comme l’ont montré, hélas, les événements de ces dernières semaines. Il ne faut cependant pas oublier de rester lucide. En effet, outre ce défi majeur, d’autres lieux et théâtres de confrontation subsistent. Ainsi, le Général Hiver n’a pas calmé les ardeurs des combattants dans l’Est de l’Ukraine, tandis que les provocations se multiplient dans les espaces bordant l’Europe et le monde russe. Les tensions restent également vives en Asie du Sud-Est, à la merci d’un dérapage militaire non maîtrisé.
Il faut donc comprendre que, plus que jamais, ce monde a-polaire que nous découvrons chaque jour est source de confrontations, de rivalités et de conflits potentiels. Il convient donc de pouvoir comprendre pour mieux anticiper, mais aussi de pouvoir disposer des outils permettant d’y répondre, c’est-à-dire les moyens, les budgets et les hommes et femmes nécessaires, qui, au quotidien, démontrent leur engagement au service de la France.