Au-delà du Golfe, quelle armée de terre demain ?
Dernier commandant du 1er corps d’armée de Metz dissous à l’été 1990, et ayant commandé simultanément la 6e région militaire d’avant la réorganisation de 1991, le général de corps d’armée Clarke de Dromantin était bien placé pour débattre de l’Armée de terre dans une logique globale de défense qui tienne compte des leçons de la guerre du Golfe, de l’évolution de la situation internationale et des risques qu’elle engendre.
Le livre ramassé et dense qui en résulte se situe à la fois dans le cadre de la préparation de la future Loi de programmation militaire (LPM), à laquelle il veut apporter sa contribution, et dans l’ensemble plus vaste des questions qui se posent en cette fin de siècle à la défense. C’est donc après avoir défini un contexte général, stratégique, géopolitique et moral, que le cas particulier de l’Armée de terre est abordé et fouillé avant d’élargir de nouveau les perspectives dans des domaines intéressant chacune des armées au sein de la fonction de défense.
Prenant nettement position sur le rôle des armées, sur la façon de concevoir la défense de la France dans le concert européen, l’auteur étudie à fond la question du recrutement. Il se livre ainsi à une étude chiffrée dont le principe demeure valable quel que soit le volume finalement choisi pour les forces, et en examinant objectivement le coût et la faisabilité de différentes solutions, allant d’une armée partiellement de métier et de conscription jusqu’à une armée entièrement professionnelle, sans oublier le cas d’un corps de manœuvre de métier et d’une armée territoriale de conscription. Puis, après avoir caractérisé les combats très interarmées de demain et avoir situé le rôle que peuvent y tenir les forces françaises, il examine successivement ce qu’il estime être les atouts, les faiblesses et les impératifs de l’Armée de terre, les structures qui lui conviendraient, pour l’active comme pour la réserve, et les priorités de formation qui doivent en résulter. On atteint là le cœur du sujet avec, d’une part, des faits irréfutables et, d’autre part, des idées qui restituent la conviction d’un homme de métier et donc propices à la réflexion, même si elles doivent faire grincer quelques dents et bousculer des positions acquises.
Avant d’achever, le narrateur donne son point de vue sur la difficulté de la sélection et sur les moyens de l’améliorer. Il propose de restituer au commandement une part plus importante dans la défense des intérêts de ses subordonnés et s’exprime vigoureusement sur ce qui permet à une armée d’être.
La conclusion de l’ouvrage est en deux parties, la première ayant été rédigée avant le putsch de Moscou, et la deuxième après. Toutes deux convergent vers le même constat : rien ne peut faire qu’une armée ne coûte pas cher si on veut qu’elle soit efficace et rien ne peut, au-delà d’un seuil sur le point d’être atteint, remplacer les hommes destinés à la servir en nombre suffisant pour qu’elle continue d’exister.
Cette étude, qui révèle une connaissance approfondie de l’armée et une passion pour ce qu’elle représente, intéressera tous ceux qui apprécient la sincérité, la clarté des arguments et l’engagement raisonné au service d’une cause juste. ♦