Le ministère de la Défense est dans un processus permanent de transformation et d’adaptation depuis plusieurs décennies, au prix de choix parfois douloureux. La tendance lourde à l’interarmisation est inéluctable et indispensable pour l’engagement opérationnel, à condition de conserver une cohérence d’ensemble à ce projet.
La transformation du ministère de la Défense, entre cohérence et vigilance
The Transformation of the Ministry of Defence, Between Continuity and Vigilance
The Ministry of Defence has been engaged in a permanent process of evolution and adaptation for several decades, at the price of choices that are sometimes painful. The weighty tendency for joint operation between military branches in inevitable and indispensable for operational engagement, under the condition that a single coherence concerning this project is conserved.
L’apparition relativement récente du mot « transformation » dans le vocabulaire du ministère (1) pourrait laisser penser qu’il désigne un phénomène lui aussi relativement récent. Si l’on admet que ce terme est en réalité utilisé en substitution du mot « réforme », par tropisme anglo-saxon ou crainte d’utiliser des mots qui fâchent, il n’en est bien entendu rien. Au cours du demi-siècle qui nous sépare de la fin de la guerre d’Algérie, le ministère de la Défense a en effet subi sous ses différentes appellations une série de bouleversements telle qu’il n’est pas exagéré de dire qu’il a vécu une longue période de réforme permanente, qui a connu son apogée au cours de la décennie écoulée, et qu’il s’est profondément transformé.
Transformation du volume de ses effectifs, passés de 672 000 militaires en 1964 à moins de 280 000 au total (dont 215 000 militaires) en 2013 (2), du statut de son armée, alors armée mixte à forte composante de conscription et aujourd’hui armée professionnelle, des armements mis en œuvre par cette dernière, alors uniquement conventionnels et aujourd’hui à la fois conventionnels et nucléaires, du contexte géostratégique avec la fin de la « guerre froide » et la multiplication des opérations extérieures, de son périmètre avec le rattachement organique de la Gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur, entraînant notamment la perte de 40 % de ses sous-officiers, transformation de sa gouvernance enfin sous la triple contrainte de la contraction des effectifs, de la réduction des budgets et de la nouvelle architecture budgétaire issue de la Loi organique relative aux lois de finances (Lolf).
Observateur privilégié de la gouvernance du ministère, le Contrôle général des armées (CGA), chargé par l’article D.3123-1 du Code de la défense « d’assister le ministre pour la direction du ministère », est sans doute particulièrement bien placé pour situer les épisodes les plus récents de cette transformation dans la perspective de l’évolution du ministère au cours des cinquante dernières années, pour rappeler les grands traits de la transformation de la dernière décennie et faire un point de situation à la veille du regroupement du ministère à Balard.
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