Liées de façon étroite et complexe, économie et défense sont deux composantes essentielles de toute politique visant à assurer à la nation un degré suffisant d'indépendance. L'auteur, inspecteur des finances, dégage les multiples aspects économiques de la défense, souligne leur importance et le caractère permanent de leurs interactions. Directeur de la Division des affaires économiques au Secrétariat général de la défense nationale (SGDN), il s'est inspiré de la conférence qu’il a prononcée le 29 janvier 1976 devant les étudiants du Diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) de Défense à l'Université de Paris II.
Économie et défense
La défense d’une nation ou d’une collectivité a toujours revêtu des aspects multiples. Si la guerre en est la forme absolue et la plus ostensible, elle n’en est pas la seule. Clausewitz, dans sa formule fameuse — qui est d’ailleurs à peu près la seule que l’on connaisse généralement de cet auteur — affirmait que la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens (1). Mao Tse-toung exprimait la même idée quand il écrivait : « La guerre est un prolongement de la politique… La politique est une guerre non sanglante et la guerre une politique sanglante » (2).
À ces constatations, dont toutes les époques ont fourni maints exemples, s’ajoutent de nouveaux enseignements apportés par l’histoire contemporaine et qui ont donné à la défense une signification nouvelle. Alors que jusqu’au début du XIXe siècle, n’avaient pesé dans les conflits, toujours selon l’expression de Clausewitz, « qu’une armée réduite et les revenus limités de l’État » (3), un nouveau concept, celui de la « nation armée », est apparu avec les guerres napoléoniennes, puis, plus récemment, avec la première et surtout la deuxième guerre mondiale.
La globalisation de l’effort de guerre s’est notamment caractérisée, sur le plan économique, par une industrialisation croissante des appareils militaires sur le modèle des grandes sociétés anglo-saxonnes, par l’apparition des premières mesures de planification et par la mainmise directe de l’État sur des secteurs entiers et de plus en plus vastes de l’activité économique tandis que, sur le plan démographique, elle rendait infiniment subtile, jusqu’à la faire presque complètement disparaître, « la distinction classique entre combattants et non-combattants » (4).
Il reste 96 % de l'article à lire
Plan de l'article