La Russie modernise son arsenal nucléaire non pas dans un but offensif, mais plutôt pour assurer sa défense face à des pays occidentaux menés par les États-Unis trop enclins à présenter Moscou comme un adversaire potentiel et non comme un partenaire.
Sur le risque d’une guerre nucléaire en Europe
On the Risk of Nuclear War in Europe
Russia is modernising its nuclear forces, not so much for offensive use as for ensuring its defence against Western countries carried along by a United States too inclined to portray Moscow as a potential adversary, rather than a partner.
Les événements en Ukraine et autour de ce pays ont conduit non seulement à ébranler l’ordre international sur le continent européen, établi après la chute de l’Union soviétique, mais aussi à provoquer une crise profonde des relations entre la Russie et l’Occident. Pour la première fois depuis des décennies, le spectre d’une grande guerre, voire d’une guerre nucléaire, est apparu en Europe. On ne peut pas dire que ce danger ne soit pas perçu dans les pays européens. La démarche commune de la chancelière allemande Angela Merkel et du président français François Hollande qui a permis de conclure en février 2015 l’accord Minsk-2, en est la preuve. C’est surtout François Hollande qui a eu la lucidité de dire que l’alternative à cet accord pourrait être « une grande guerre ». Mais grosso modo l’opinion publique et les médias de toutes les parties concernées sous-estiment cette menace.
C’est la surenchère en matière de propagande, de part et d’autre, et une sorte de diabolisation mutuelle, qui, à un moment, ont conduit à franchir un certain seuil psychologique à cet égard. Dans les médias américains, par exemple, il y a de plus en plus d’articles où l’on examine les différents scénarios d’intervention militaire en Ukraine pour repousser « l’agression russe ». Les livraisons massives d’armes « létales » à l’armée ukrainienne, demandées par le Congrès des États-Unis, y sont présentées comme « un strict minimum », mais il s’agit aussi de l’emploi des forces aériennes et même, « au cas extrême », de l’envoi des troupes au sol. Ce dernier scénario semble peu probable, mais le fait qu’il soit quand même examiné en dit long sur l’hystérie antirusse qui est aujourd’hui caractéristique, au moins pour une partie des élites américaines.
En Europe, c’est en Pologne où les médias ont commencé à envisager la perspective d’une guerre avec la Russie bien avant la crise ukrainienne. Aujourd’hui ce sujet est discuté plus vivement et avec encore plus d’hostilité à l’égard de la Russie. L’aspect le plus inquiétant de ce délire est le fait que l’on puisse penser que les analystes polonais sont conscients des risques d’une guerre avec une puissance nucléaire, tout en étant persuadés que la menace des frappes nucléaires éventuelles russes dans le cadre d’une telle guerre ne soit qu’un « bluff ».
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