Bazooka
Voici un reportage écrit dans un style alerte, très « journalistique », parfois quelque peu insuffisant. Maloubier a confessé Philippe Castille, auteur de l’attentat et spécialiste des explosifs. Maloubier brode-t-il ? Castille a-t-il roulé Maloubier ? Et qui a roulé Castille ?
En gros, Debré veut faire tuer Salan parce qu’il entend garder l’Algérie française et que celui-ci s’apprête à la brader. Sur cette proposition de départ, le coup de bazooka a bien été tiré. À partir de cette certitude, la seule irréfutable, il est bien probable qu’il y eut de hauts personnages dans l’ombre, des factions se déchirant et, en bout de chaîne, des exécutants désavoués par leurs commanditaires et qui finirent bien seuls sur la paille des cachots, heureux au demeurant de s’en tirer à si bon compte. Le nom de Bonnier de la Chapelle (assassin de l’Amiral Darlan et exécuté le lendemain, supposément abandonné par ses commanditaires également) n’est pas évoqué par hasard.
Mais quel gâchis, en cette période « brouillonne et pathétique », comme le dit Lartéguy dans sa préface, que de légèretés et de bavardages, de faiblesses et de lacunes ! Malgré le décor ensoleillé, les filles bronzées, l’anisette et le vocabulaire haut en couleur, c’est un sentiment de tristesse qui prévaut devant ces bagarres franco-françaises se terminant par la « coalition de l’agonie » entre les « pieds noirs », des soldats « cocus, battus et pas contents » et la « caste des idéalistes impénitents ».
Goûteront surtout ce livre, avec un brin de nostalgie, ceux pour qui le clos Salembier fut un lieu familier. Bal el-Oued un nom porteur de mille images, ceux qui, en entendant que quelqu’un avait déclaré à Alger : « Je vous ai compris », n’en déduisent pas forcément qu’il s’agit d’Isabelle Adjani ! ♦