La monarchie nucléaire
Samy Cohen s’est fait une spécialité de l’étude des divers cercles de conseillers gravitant autour du chef de l’État. Cette fois-ci, c’est à la description de l’entourage en matière de politique extérieure qu’il s’attache. L’exercice est délicat, car il doit éviter l’écueil d’études trop pesantes ou théoriques tout en ne pouvant pas avoir le caractère vivant du témoignage de l’intérieur.
Il réussit à emporter la conviction du lecteur par la justesse de ses informations et le nombre de témoignages qu’il a recueillis. Avec lui, le lecteur pénètre dans les antichambres du palais de l’Élysée, les salons ou bureaux du Quai d’Orsay ou les salles de commission du palais Bourbon. Les caractères ou tempéraments des divers ministres sont passés en revue. Certaines actions de politique extérieure sont décrites par le menu, comme le voyage de Valéry Giscard d’Estaing à Varsovie en mai 1980. Mais que reste-t-il au-delà de ces descriptions au demeurant fort utiles voire captivantes ? L’ouvrage reste trop pointilliste ; il lui manque une véritable réflexion sur les méthodes d’élaboration et de mise en œuvre de la politique extérieure. L’ensemble de celle-ci, dans sa continuité, comme dans ses variations conjoncturelles, n’est appréhendé qu’au travers de la description parfois assez fouillée, de telle ou telle affaire (comme la crise énergétique de l’automne 1973 ou l’affaire tchadienne de l’été 1983).
Aussi doit-on prendre la « Monarchie nucléaire » pour ce qu’elle est, à savoir une étape dans une recherche de plus longue haleine sur le processus de décision en matière de politique extérieure. Dans cette optique, les orientations de recherche ne manquent pas, des réactions de l’opinion publique aux diverses interactions entre politiques intérieure et extérieure.