Mémoires d’exil et de combats
Par le décès, en 1883, du dernier prétendant légitime, c’est à la maison d’Orléans qu’est passé l’héritage du trône.
Depuis la loi d’exil de 1886, les chefs de la maison de France ont vécu à l’étranger. Il en fut ainsi de Jean III, duc de Guise, en exil en Belgique depuis 1926 avec son fils Henri VI, comte de Paris, lequel lui succéda en 1940. Le comte de Paris a vécu au Maroc jusqu’à l’âge de 17 ans. C’est là qu’il a commencé à réfléchir à l’avenir de la monarchie et c’est le fruit de cette réflexion qu’il nous livre ici. Il pense que la légitimité du monarque n’est pas de droit divin mais qu’elle réside dans l’assentiment des Français. N’admettant pas que le mouvement d’Action française fasse écran entre la maison de France et la nation, il a fondé son propre journal et, dès 1934, s’est séparé de Charles Maurras, tout en condamnant le régime des partis pratiqué par la IIIe République. À cette époque, il se prononce contre une politique extérieure d’apaisement.
Après la défaite de 1940, le comte de Paris se retrouve au Maroc où les Américains débarquent en novembre 1942. L’Afrique du Nord est alors en pleine confusion, et la situation est encore compliquée par la présence de Darlan qui pour les Américains offre l’avantage d’un expédient provisoire commode. Ceux qui aspirent à l’union des Français dans la guerre, en particulier ceux qu’on appelle les « cinq », offrent le pouvoir au comte de Paris. Mais tout est subordonné au départ de Darlan, lequel, fort de l’appui américain, entend se maintenir. Le plan visant à l’union de tous les Français, Français libres compris, a échoué. Il se réalisera plus tard, mais sans le comte de Paris qui suivra désormais les événements sans s’y mêler. Partisan de la décolonisation (il approuve la politique de Mendès-France), et de la rénovation de nos institutions, il soutient faction du général de Gaulle.
Ne se comportant pas en prétendant, il se veut le serviteur de son pays. Mais son espoir d’un destin national est déçu le jour où le général décide de se représenter aux élections présidentielles de 1965. Depuis lors il marque un certain désenchantement à l’égard de l’évolution du régime, sans rien abandonner d’ailleurs de son admiration pour l’œuvre de Charles de Gaulle. Il reste le représentant lucide et libéral d’un passé glorieux. Encore que le livre n’en fasse pas mention, il nous faut aussi rappeler combien le patrimoine historique et artistique de notre pays s’est enrichi grâce à la création récente par le comte de Paris de la fondation Saint-Louis à laquelle il a fait apport de ses biens.
Les mémoires du comte de Paris aident à mieux connaître l’histoire des idées politiques, en particulier l’idée monarchique sous les formes qui lui ont été tour à tour imprimées par Charles Maurras et par la maison de France prônant le principe d’un pouvoir exécutif fort. Ils nous éclairent sur l’imbroglio d’Alger de 1942 et apportent de nouveaux témoignages sur le général de Gaulle lui-même et sur le cheminement de ses pensées. D’intéressants documents inédits ou peu connus sont publiés en annexe. ♦