Arès 1977. Défense et Sécurité
Ce volume, paru en 1978, est le premier recueil d’études et de chroniques relatives à la défense et à la sécurité internationale publié par des universitaires de Grenoble, Lyon et Nice. Les 19 articles reflètent la variété des tempéraments de leurs 16 auteurs et de leurs disciplines de base : sciences juridiques, économiques, politiques, sociales ou humaines ; cependant, ils présentent une certaine parenté due à l’utilisation d’une commune méthode en honneur dans nos universités pour appréhender les questions à traiter, utiliser les documents qui s’y rapportent et faire un point précis et complet de l’état où elles se trouvent.
On prendra à l’étude de Jean-Pierre Béroud sur « le parti socialiste et le service national » un double intérêt : celui, d’abord, de suivre, depuis L’Armée nouvelle écrite en 1910 par Jean Jaurès jusqu’aux travaux récents de la commission du parti présidée par Charles Hernu, l’évolution des idées concernant une défense indépendante et efficace jugée indispensable pour permettre la transition vers une société nouvelle par ceux des socialistes qui refusent l’antimilitarisme et le pacifisme en même temps que le conservatisme et le conformisme en cette matière ; l’autre intérêt majeur de cette étude est à nos yeux de poser le problème du service militaire, ou du recrutement des forces armées, dans son ensemble, en dépassant le cadre du seul parti socialiste, dont on ne manquera pas de noter le souci, selon notre auteur, de chercher une formule entraînant la réanimation et la rénovation d’un esprit de défense populaire sans lequel aucune défense nationale n’est concevable. On rapprochera cette large étude politique des chroniques que Michel Dobry consacre dans le même volume au sujet « Les partis politiques et la défense », aux « positions officielles » et aux « Débats et travaux parlementaires » de 1977.
De ce dernier auteur, une « Note sur la théorie de l’interaction stratégique » fait le point des principales orientations prises par les théoriciens qui étudient comment intervient dans la décision prise par un joueur la considération du comportement qu’elle pourra entraîner chez son protagoniste ; ces notions éclairent le processus des concessions réciproques faites pour aboutir à un accord par deux puissances marchant « à petits pas » ou « au bord du gouffre », et l’autre processus qui se ramène à un échange entre elles de « coups » dans une suite de promesses, de menaces et d’engagements, sans exclure l’usage de la force.
Jacques Fontanel procède à « l’analyse de la guerre dans la pensée économique », depuis le temps où les mercantilistes la tenaient pour un instrument nécessaire au développement de la puissance de l’État jusqu’à l’époque actuelle où ses causes économiques comme ses causes politiques ou psychologiques sont indissociables des structures sociologiques. Passant en revue les aspects juridiques et économiques que comportent « les exportations de matériels militaires ». Jean-Marie Rainaud et Jacques Spindler, dans une étude très poussée, mettent en balance l’impératif économique qui s’impose de manière croissante à l’industrie d’armement avec le souci de sécurité nationale auquel elle doit répondre et qui fut sa raison première d’exister et de se développer. Dans l’ordre économique également, il faut indiquer les pertinentes considérations d’ordre général que suggère à Pierre Jamet et à Jacques Percebois dans leurs chroniques l’examen du budget de défense pour 1978.
Deux questions relativement nouvelles, celle des « zones maritimes soumises à la juridiction nationale des États » et celle des « zones exemples d’armes nucléaires », donnent lieu respectivement de la part de René-Jean Dupuy et de Jean-François Guilhaudis à des études approfondies d’un caractère très juridique. En matière de conventions internationales, plusieurs chroniques traitent des réunions qui se sont tenues en 1977 dans le cadre du fonctionnement du traité de l’Atlantique Nord, du traité de l’Union de l’Europe occidentale, de la charte des Nations unies, de la Convention provisoire relative à la limitation des armements stratégiques et des conventions de Genève.
On peut regretter de ne disposer qu’en 1979 de chroniques qui se rapportent à 1977. Mais si l’intérêt d’actualité s’en trouve singulièrement émoussé, elles n’en constituent pas moins de précieux documents pour l’étude des questions de défense et de sécurité internationale abordées par les auteurs. C’est le cas notamment du texte de Philippe Chapal relatif à « l’action de la France au Zaïre en 1977 » ; il ne peut prétendre à la qualification, sous laquelle il figure pourtant, de « question d’actualité », mais il éclaire utilement ce que fut, plus près de nous, l’intervention militaire française au Shaba en 1978. ♦