Churchill and the admirals
Les marins voient toujours avec plaisir paraître un nouveau livre du capitaine de vaisseau Roskill, auteur de l’histoire officielle de la marine royale britannique dans la Seconde Guerre mondiale (The War at Sea 1939-1945 – HMSO 1954-1961). Avec celui-ci nous découvrons, à travers les rapports de Churchill avec ses amiraux entre 1911 et 1945, un portrait nouveau du personnage et de son action dans les domaines militaires et maritimes avant et pendant les deux dernières guerres.
Roskill a connu personnellement la plupart des officiers généraux concernés, d’où le caractère vivant de son récit qui ne craint pas de laisser transparaître ses amitiés ou inimitiés. Il nous montre en particulier un Churchill devenant ministre de la Marine en 1911, à trente-sept ans, et faisant revenir à la tête de l’amirauté, en 1914, le vieux et terrible « Jacky » Fisher, avec qui il se brouille sur l’affaire des Dardanelles, laquelle fut pour Churchill un échec personnel cuisant. De 1915 à 1939, Churchill occupe des fonctions diverses en dehors de l’amirauté mais certaines d’entre elles le mettent en rapport avec les principaux amiraux de l’époque, en particulier quand il est ministre des Finances et qu’il propose, en 1928, de rendre perpétuelle la règle qui voulait que la Grande-Bretagne ne fût pas impliquée dans une guerre majeure dans les dix années à venir, règle qui ne sera abolie qu’en 1933.
La guerre voit Churchill revenir à l’amirauté où sa conduite de la campagne de Norvège donne lieu à beaucoup de critiques. Puis il devient Premier ministre, et ses relations avec les amiraux prennent un tour tragique avec Mers-EI-Kébir qui soulève leur réprobation unanime. Certains, comme Andrew Cunningham, vont jusqu’à la limite de la désobéissance. La guerre suit son cours et Roskill y montre un Churchill intervenant souvent par-dessus la hiérarchie normale pour des détails d’exécution, mettant sa confiance dans des officiers généraux des trois armées ou la leur retirant sans autre raison que l’image qu’il s’en fait par rapport à un type assez romantique d’officier très mordant et offensif.
En fait, pense Roskill, nombre de ces grands chefs reconnaîtraient Churchill dans ce portrait qu’il peignait lui-même d’un général hollandais de la guerre de succession d’Espagne : « un civil porté vers les choses militaires et fasciné (sans aucune connaissance professionnelle) par l’art de la guerre… Il combine le courage et l’ignorance avec un esprit fertile en plans d’action ; son jugement militaire est déficient jusqu’à l’enfantin ; son énergie est débordante » (Churchill, Marlborough, tome II, Éditions Harrap 1947). ♦