Les ressources de l’océan
Cet excellent ouvrage de vulgarisation se propose de faire ressortir le rôle de plus en plus important dans le développement des activités économiques sur notre planète des masses océaniques qui en occupent la majeure partie. Pendant des siècles, l’utilité des océans était presque exclusivement limitée aux transports maritimes, qui permettaient l’essor du commerce international, et à la pêche, le plus souvent côtière, qui fournissait à certains pays un complément précieux de ressources alimentaires. Mais aujourd’hui, bien que ces domaines d’activité anciens aient conservé toute leur importance, de nombreuses possibilités nouvelles sollicitent l’imagination et attendent des initiatives.
Ce développement a été rendu possible, avant tout, par une meilleure connaissance des océans, acquise au cours des nombreuses campagnes océanographiques de ces dernières décennies. Ce sont ces campagnes, menées à l’échelle internationale, mais auxquelles la France a le plus souvent très largement participé, qui ont permis de préciser définitivement la véritable nature des fonds marins et la constitution des eaux marines. Grâce aux progrès de la technologie, cette première phase « exploratoire » débouche maintenant sur l’exploitation à grande échelle des ressources ainsi inventoriées et circonscrites. Ces ressources sont variées, nombreuses et importantes. En toute première place vient, bien entendu le pétrole. Les réserves sous-marines prouvées se montent actuellement à 17,8 milliards de tonnes, soit 22 % des réserves totales. Leur exploitation pose des problèmes technologiques extrêmement complexes que seules les puissances hautement industrialisées, disposant de capitaux considérables, sont à même de maîtriser. Il en est de même, dans la plupart des cas, des ressources minérales : zinc, étain, cuivre, uranium, pour ne citer que les principales.
En dehors de ces matières premières, les océans peuvent également fournir directement une énergie qui leur est propre : énergie marémotrice produite par le mouvement des marées, énergie maréthermique due aux différences de température entre les eaux de surface et les eaux profondes. Cependant, les perspectives pratiques d’utilisation de cette formidable énergie potentielle sont relativement limitées, quoi qu’on en ait pu penser à certaines époques.
Par contre, on peut beaucoup espérer des nouvelles méthodes d’exploitation des ressources alimentaires de l’océan. Ces méthodes sont désignées sous le terme d’aquaculture, et elles sont à la pêche ce que l’élevage est à la chasse. Il est intéressant de noter à leur propos que, mutatis mutandis, les rendements atteints dans le domaine océanique par la production d’huîtres ou de moules par exemple, sont près de 15 fois supérieures à ceux obtenus, dans le domaine terrestre, par l’élevage du bétail : 8 tonnes de chair à l’hectare et par an au lieu des quelque 530 kg de viande produits sur un pâturage de bovins. Pour d’autres espèces les résultats sont sans doute moins spectaculaires, mais les techniques s’affinent et le cycle naturel qui conduit « du plancton végétal au thon » se perfectionne à la mesure des progrès de la science.
Le grand intérêt du livre de David Coulmy et Jean-Pierre Page ne tient cependant pas uniquement aux développements spécifiques qu’il consacre à chacune des questions particulières évoquées ci-dessus. Il tient surtout à la vue globale qu’il nous propose des rapports nouveaux qui se sont peu à peu créés entre l’homme et la mer. Certes, nous savons depuis longtemps que l’océan est à l’origine de toute vie sur notre planète, mais nous pouvions penser qu’au stade actuel de l’évolution des êtres vivants, le cordon ombilical était depuis longtemps coupé. Pas du tout ! Plus la vie se perfectionne, plus nous devenons dépendants de notre milieu d’origine. Et c’est peut-être son utilisation rationnelle qui assurera un jour notre survie ! ♦