Charles de Gaulle et la guerre d’Indochine
En une quinzaine de petits chapitres, dont certains débordent d’ailleurs du sujet indiqué par le titre de l’ouvrage, Alfred Georges s’efforce de démontrer la responsabilité fondamentale du général de Gaulle dans le déclenchement et la poursuite de la guerre d’Indochine. Démonstration appuyée sur des citations, des messages et des discours, sur des exégèses de divers textes gaulliens, mais étayé surtout sur la profonde inimitié que l’auteur voue à de Gaulle et au gaullisme. Certes, le général de Gaulle, par nature, connaissait peu les problèmes spécifiques d’Indochine ; certes, « homme du refus », il ne pouvait – viscéralement – accepter l’éviction brutale de la France des plus belles provinces de son Empire, bien qu’il ait prévu l’évolution fatale des rapports entre colonisateurs et colonisés. Mais le charger seul des responsabilités directes dans le déclenchement de la guerre est, semble-t-il, méconnaître la part de « jacobinisme » qui a toujours tempéré les ardeurs libérales ou progressistes des leaders de nos partis marxistes ou marxisants au pouvoir – ce qui était le cas en 1946-1947 –, c’est aussi oublier le caractère provocateur et délibérément agressif des leaders du Vietminh en 1946, quoi qu’ait pu en dire ou en penser leur chef Ho Chi Minh.
Au total, le petit livre d’Alfred Georges, malgré une tonalité générale assez déplaisante, ne manque pas d’intérêt. S’il éclaire mal encore le visage réel de notre Indochine de 1940 à 1945, du moins apporte-t-il une pierre de plus à l’édifice qui s’élève peu à peu sur les bases qu’ont déjà jetées notamment les ouvrages de Sainteny et Devillers, quant aux origines d’un malheureux mais peut-être inévitable conflit. ♦