La Monarchie Républicaine
Il est superflu de présenter Maurice Duverger. Comme directeur du Département des Sciences Politiques à la Sorbonne, mais aussi comme écrivain, journaliste et débatteur, il occupe, depuis un quart de siècle, une place éminente dans la vie intellectuelle française. Son audience, dans notre pays, s’étend à tous les milieux sociaux et sur plusieurs générations. Mais elle déborde aussi très largement hors de nos frontières.
Le hasard a voulu que son nouveau livre paraisse à un moment où son sujet était particulièrement susceptible de retenir l’attention : en période d’élection présidentielle. Tout le pays profitait, en effet, de l’occasion pour réfléchir aux institutions qu’il s’était récemment données et qui étaient pour la première fois mises à l’épreuve dans une conjoncture normale. (En 1965, la stature historique du candidat de Gaulle exerçait sur les Français une fascination inhibitrice : en 1969, le départ du Général poussait à dramatiser la situation). Aujourd’hui encore, bien que le résultat des élections soit acquis, les raisonnements de Maurice Duverger gardent tout leur intérêt pour qui se préoccupe de l’usage que le président élu compte faire des institutions.
La principale thèse du livre c’est que les régimes politiques de la plupart des démocraties occidentales évoluent vers un système où le centre d’impulsion est un monarque élu. « Seuls en Europe, nous dit l’auteur, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas et la Suisse ne sont pas des monarchies républicaines ».
Maurice Duverger présente à l’appui de cette thèse une analyse théorique, minutieuse et souvent subtile, des textes constitutionnels en vigueur. Mais, au-delà des considérations juridiques, il montre que c’est le plus souvent en observant le fonctionnement pratique réel d’un régime dans les domaines économique et social qu’on peut le mieux cerner la nature véritable des institutions.
Tout en consacrant des développements aux États-Unis et à la Grande-Bretagne, il réserve bien entendu une place prépondérante à l’examen du cas français. La parfaite connaissance qu’il possède de notre classe politique et de ses comportements au cours des deux dernières décennies lui permet ici de compléter son étude en y introduisant un élément psychologique qui donne beaucoup d’animation à son livre. Finalement ce qui aurait pu n’être qu’un aride traité de droit constitutionnel comparé est devenu un ouvrage très vivant consacré à l’actualité politique. ♦