Socialisme de l’ère atomique
Jules Moch n’est pas un théoricien, mais un praticien du socialisme. Son nom est étroitement lié à la période de 1935 à 1951 de l’histoire intérieure de notre pays, qui fut celle de la participation des socialistes au pouvoir, on pourrait presque dire : de l’exercice du pouvoir par les socialistes, dans le cadre du régime existant. Par ses possibilités d’action, une pareille position convenait fort bien à cet ingénieur polytechnicien, issu de la bourgeoisie, et attaché aux réalités concrètes. Aussi laissait-il volontiers à son maître Léon Blum le soin d’expliquer qu’il n’y avait rien dans cette altitude qui fut contraire à l’aspiration du socialisme à une plus grande justice sociale.
Le présent ouvrage constitue d’abord une tentative pour faire le bilan, en France et à l’étranger, des résultats obtenus par le socialisme réformateur, en comparant l’évolution des pays qui l’ont expérimenté à celle des pays qui, soit sont restés fidèles aux théories libérales, soit ont choisi le socialisme révolutionnaire. Mais ceci fait, Jules Moch nous convie à nous tourner vers l’avenir, car le socialisme de l’ère atomique doit être différent de celui de Jean Jaurès et même de Léon Blum. Malgré cela, ou pour cela, il « demeure le grand espoir de l’avenir… Il correspond aux besoins de l’évolution technique et aux impératifs de la civilisation… Il triomphera par la force de la raison du capitalisme se dégradant ».
Jules Moch, prudemment, n’assigne aucun délai à ce triomphe inéluctable. Retiré depuis des années de la vie politique active, les questions de tactique ne le préoccupent pas outre mesure. Il tient cependant, en analysant les perspectives ouvertes en France par l’union de la gauche, à se démarquer nettement du communisme léniniste qui constitue « par le régime imposé à la vie sociale et par le conformisme imprimé à la conscience, un retour vers le passé ». ♦