Science économique et lucidité politique
Théorie et pratique de l’économie, spécialités respectives des coauteurs, font excellent ménage dans ce petit livre de vulgarisation destine au grand public et publié dans une édition de poche. Il répond à deux préoccupations essentielles. La première est de rendre les lecteurs attentifs au fait que la science économique est en pleine évolution et que ceux qui se croient à la page parce qu’ils ont, enfin !, assimilé la Théorie générale de Keynes, ne sont en réalité que des attardés. La deuxième est de mettre en garde ceux qui ne jurent que par le modèle FIFI (« modèle physiofinancier »), et autres gadgets du même genre, contre une confiance excessive en l’efficacité des méthodes de prévision économique, qui ne valent que par l’application qu’on en fait.
Pour atteindre ce double objectif, les auteurs ont fort habilement utilisé la méthode historique, consistant à rechercher la part des théories économiques dans les décisions gouvernementales visant à modifier ou à infléchir les mécanismes économiques et financiers qui régissent la vie des États. De ce point de vue, leur livre, surtout dans sa première partie, prend parfois l’allure d’un véritable roman d’aventures économiques. Mais, sur un plan plus théorique cette fois, ils ont également cherché à démontrer l’absolue nécessité des analyses économiques (dont le Plan est un exemple) pour atteindre les objectifs politiques jugés prioritaires, plus particulièrement dans le domaine social.
Les auteurs voudraient surtout que l’ensemble des citoyens, individuellement et collectivement, prennent conscience de l’intérêt pratique de la science économique et exigent des pouvoirs publics qu’ils renoncent aux options politiques qui ne seraient pas scientifiquement justifiées. C’est sans doute un peu trop demander aux Français moyens dont on connaît la méfiance viscérale pour le moindre fumet de technocratie. Et le livre de Pierre Mendès France et Gabriel Ardant n’en est pas exempt, loin de là. ♦