Terre d’Israël
Les maisons d’édition à grand tirage n’ont pas coutume de lancer leurs ouvrages comme l’a été celui-ci : sous jaquette pelliculée en quadrichromie, sur papier couché 180 gr et avec près de 300 photographies très bien reproduites pour un livre de quelque 300 pages. Il y aurait donc gros à parier qu’une discrète subvention des services de propagande d’un État du Proche-Orient soit à l’origine de tant de soins et de luxe apportés à la présentation.
On est d’autant plus surpris de constater la remarquable objectivité de l’ouvrage. Remarquable… mais légèrement fallacieuse tout de même. Car, si rien n’est dissimulé en ce qui concerne les faits, et si les thèses les plus hostiles à Israël sont exposées sans aucuns détours, l’amalgame auquel ces données sont soumises est à ce point habile que le lecteur ne peut s’empêcher, s’il est de bonne foi, de se dire : « Mais comment donc la politique d’Israël pourrait-elle être différente de ce qu’elle est ? »
Cette restriction faite, il nous paraît difficile de recommander une meilleure lecture à qui voudrait, s’interdisant toute option a priori, vraiment comprendre l’angoissant problème qui se pose aujourd’hui au Proche-Orient. Ce n’est pas à la partie historique du livre (avant la naissance, à la fin du siècle dernier, du sionisme) que nous pensons en disant cela. Jean-Pierre Alem n’est pas un historien, mais tout au plus, en cette matière, un autodidacte intelligent. L’histoire ancienne de la Palestine qu’il nous présente est une bonne compilation, sans plus. Mais dès qu’il nous parle de ce qu’il a vu et connu lui-même, il se révèle à la fois comme un observateur auquel rien n’échappe et comme un enquêteur exceptionnellement doué, cherchant à aller au fond des choses, sans négliger le moindre indice. C’est ainsi que le chapitre qu’il consacre au problème crucial de la coexistence entre Juifs et Arabes, nous a paru pertinent et inattaquable, quel que soit le parti pris des uns ou des autres. Et il en résulte, hélas ! très clairement, que seuls ceux qui ont ce parti pris peuvent prétendre qu’ils connaissent la solution des difficultés actuelles.
Notons, à titre anecdotique, que Jean-Pierre Alem a publié un recueil de jeux mathématiques et qu’il a été lauréat, en 1967, du Grand Prix de Littérature policière. ♦