La politique arabe de la France
Le moins qu’on puisse dire de l’ouvrage de Paul Balta et de Claudine Rulleau, c’est qu’il est un ouvrage d’actualité, puisque son sous-titre porte : « De de Gaulle à Pompidou ». Mais il s’agit de la défense et de l’illustration d’une entreprise politique dont les auteurs marquent non seulement la nécessité présente, mais aussi le lien historique : loin de « renverser les alliances », comme certains ont pu le dire hâtivement, le général de Gaulle a renoué avec un passé prestigieux qui, de Charlemagne à lui-même, passe par les Valois, les Bourbon, Bonaparte (qui disait : « L’Europe est une taupinière ; il n’y a jamais eu de grands empires et de grandes révolutions qu’en Orient »), Louis-Philippe (qui aida l’indépendance égyptienne contre les visées anglo-saxonnes), et enfin l’aventure coloniale de la IIIe République, aventure dont on peut dire, comme de celle des Croisades, qu’en fin de compte elle a laissé de la France, là-bas, une certaine idée ambassadrice.
« La politique arabe de la France, disent les auteurs, ne repose pas sur une vue de l’esprit. Elle est fondée sur des nécessités dont les plus importantes nous semblent être celles de la stratégie et de la politique, de l’économie et du pétrole, de la complémentarité culturelle ». Or, ces nécessités sont, pour la première fois, serrées de très près, rassemblées en un véritable dossier qui surprendra bien des préjugés. Pourtant, les faits sont là. Qu’on en juge brièvement : En 1966, année qui précède la guerre des Six jours, les exportations de la France vers Israël s’élèvent à 232 millions de Francs, contre 84 MF d’importations. La même année, nos échanges avec les pays arabes atteignaient 4 503 MF à la vente, et 9 980 M à l’achat. Si l’on passe à 1970, ces chiffres sont de 440 M à l’exportation et de 196 M à l’importation avec Israël alors qu’ils atteignent, avec les pays arabes, 7 639 M à l’exportation et 11 065 M à l’importation. « Le monde arabe pris dans son ensemble, écrivent Paul Balta et Claudine Rulleau est le premier partenaire commercial de la France, après l’Allemagne de l’Ouest ». En 1980, il disposera d’une masse monétaire égale à celle de l’Europe des « Neuf ».
De telles données devraient d’autant plus peser dans nos options politiques que nos importations du monde arabe sont vitales pour notre économie : « Prétendre, devant un tel dossier, que le pétrole sent mauvais, ou que la France a une attitude mercantile ne peut que refléter une des attitudes suivantes : l’inconscience, la mauvaise foi, un goût pervers pour le suicide économique, ou l’absence totale du sens de l’intérêt national et même du sens commun. Aucun gouvernement ne saurait se désintéresser d’un tel problème, pas plus qu’il ne saurait désormais s’en remettre aux seules compagnies pétrolières pour assurer l’approvisionnement du pays ».
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