André Malraux et le gaullisme
Il fallait à l’auteur un réel courage pour s’attaquer, dans une thèse de doctorat, à un sujet aussi délicat : l’actualité des faits, la personnalité d’André Malraux, ses fonctions ministérielles, présentaient autant d’obstacles. Janine Mossuz ne dissimule d’ailleurs pas qu’elle n’a pu obtenir tous les renseignements qu’elle désirait, ni faire la lumière sur tous les points obscurs. Sa thèse ne peut être qu’un premier état d’une étude que des historiens reprendront peut-être plus tard.
Pour l’auteur, il s’agissait de démontrer qu’André Malraux, ancien compagnon de route des communistes, ancien combattant des luttes révolutionnaires, écrivain célèbre et marqué, à tort ou à raison, par l’orientation de son œuvre active et littéraire, est resté fidèle à lui-même en devenant le chef de la Brigade Alsace-Lorraine, en répondant à la demande du général de Gaulle en 1945 de devenir l’un de ses collaborateurs, en se faisant le directeur de la propagande du Rassemblement du peuple français (RPF), en se faisant « le chantre du gaullisme » après 1958. Janine Mossuz explique que la continuité d’André Malraux, qui trouve ses sources dans la conception de la lutte permanente contre la mort, est faite d’une exigence fondamentale : « l’avènement de l’homme libre dans un monde fraternel ». La vie d’André Malraux apparaît ainsi comme une lutte constante pour atteindre cet objectif, suivant les voies que dictent le sens national et l’idéalisation de l’action.
Ouvrage de lecture aisée, la thèse de Janine Mossuz retiendra l’attention par la sincérité de l’auteur. Le lecteur y trouvera peut-être aussi un témoignage sur un homme au cours d’une période particulièrement troublée, un homme qui serait un intellectuel libéré des contraintes et des habitudes de la caste à laquelle il aurait dû normalement appartenir, mais qui a puisé dans sa personnalité la force de s’en affranchir. ♦