Histoire des Italiens
L’auteur commence son histoire en l’an 1000 et la poursuit jusqu’à nos jours, en cherchant à montrer sa « continuité ininterrompue et persévérante de travail et de peine ». Lorsqu’il s’agit de l’histoire d’un peuple, et non de celles des événements politiques et militaires qui la jalonnent, ne pourrait-on pas en dire autant de tous les peuples ? Les toutes dernières pages font ressortir l’importance du Parti communiste italien, et l’espérance qu’un jour viendra où ceux qui sont défavorisés seront enfin rassasiés. Mais peu importe l’intention politique, si elle existe ; l’ouvrage est bien de nature historique. La continuité qu’il fait le plus nettement apparaître est celle d’une civilisation raffinée, même chez des illettrés, qui comporte une philosophie heureuse et réaliste de l’existence, malgré les vicissitudes et les angoisses du moment.
On a toujours intérêt à lire ces ouvrages de grande synthèse historique, car ils ramènent notre actualité à ses véritables proportions dans le déroulement si long et si complexe de la vie nationale même si – ce qui est inévitable – la part des récentes années est relativement importante. Le tableau de la vie italienne de l’an 1000 au XVIe siècle nous semble particulièrement bien venu et riche d’enseignements sur les conditions dans lesquelles se forme une société et s’instaurent des traditions vivaces et profondes. Mais pour le lecteur français, ce livre offre un autre sujet d’intérêt : les interactions fréquentes de l’histoire de notre peuple et de celui du peuple italien. On lira avec profit, à ce sujet, les pages consacrées par l’auteur à l’influence de la Révolution française et de l’empire napoléonien sur la mentalité italienne, et comment des institutions faites pour nous se transformaient au contact de nos voisins. On trouvera là des sujets nombreux de réflexions profitables, non seulement sur le cas particulier étudié par l’auteur, mais sur un plan beaucoup plus général. Cette civilisation italienne si caractérisée et si rayonnante, s’étendant sur des États séparés et compartimentés jusqu’à l’unification du XIXe siècle, n’est-elle pas comparable, en quelque sorte, à la civilisation européenne à laquelle chacun des États modernes continue d’apporter sa contribution ? Et cette histoire des Italiens ne préfigurerait-elle pas l’histoire que l’on écrira peut-être un jour des Européens ? ♦