Vers un monde nouveau
De ces pages qui, après l’assassinat de leur auteur, prennent un ton et une signification nouvelles, nous retiendrons l’acte de foi dans l’avenir. Les misères et les petitesses du temps présent ne peuvent rien contre une marche vers un monde nouveau et meilleur. Cela ne signifie évidemment pas qu’il faille attendre que l’avenir rayonne de lui-même : l’homme doit intervenir pour hâter sa venue. Et Robert Kennedy passe en revue les grands problèmes de son pays et du monde, problèmes qui à ses yeux se confondent, car les États-Unis assument la lourde tâche et la lourde responsabilité d’être les guides des autres pays. Mais des guides bienveillants, compréhensifs, attentifs aux aspirations et aux désirs des autres, aussi éloignés qu’ils puissent paraître de l’idéal américain.
On connaît certainement les prises de position de l’ancien sénateur, candidat aux élections à la charge suprême de Président. Ce livre n’apprendra donc rien de neuf, mais il confirmera et précisera les traits essentiels de la pensée de l’auteur, de même qu’il les nuancera dans l’esprit du lecteur.
Retenons cette phrase, en raison de son sujet et de la façon dont Robert Kennedy pensait à l’avenir : « La raison ultime de l’insuffisance révélée par la force militaire, c’est qu’elle ne peut donner l’espoir. Elle est neutre, elle n’a pas de programme. » C’est à propos du Vietnam qu’il l’écrit, pour opposer « le rêve de justice, de progrès d’une vie meilleure promise aux enfants » que poursuivent les révoltés, à l’automatisme froid de la seule puissance des armes. Sur ce fond d’idéalisme, conforme à une haute tradition, apparaît cependant l’homme d’action, celui qui sait qu’il ne suffit pas de rêver pour que le destin s’accomplisse. Le mélange de sens pratique et de foi nous semble donner tout son sens humain à une œuvre qui se prolonge au-delà de celui qui l’a signée. ♦