Le gouvernement et l’administration de la France
L’auteur a voulu « unir à un aspect descriptif élémentaire, mais pratique, l’introduction aux moyens d’une réflexion sur les rapports entre les organes de l’État et le citoyen ». Cette citation montre bien quelle est l’ampleur de cet ouvrage, d’une lecture austère, certes, mais toujours intéressante.
En étudiant tout d’abord l’État, Gérard Belorgey montre à la fois quelle est son emprise dans un pays unitaire et unifié, et quelles sont ses différentes attributions, chaque jour plus nombreuses. Il décrit les organismes de tous ordres dont l’État dispose pour exercer sa mission et remplir ses multiples fonctions. Puis il se penche sur les disciplines indispensables au bon fonctionnement des rouages ; elles résultent de la démocratie, qui fait un devoir au Parlement de contrôler l’État et l’administration ; de la loi, qui règle les rapports juridictionnels entre les divers éléments de la nation ; des règles de l’économie et de l’utilisation des crédits. Il en découle un ensemble de moyens par lesquels s’effectuent les opérations dont l’État et l’administration ont la charge, moyens juridiques et humains. Enfin, il étudie l’organisation du territoire, sous sa forme présente et dans ses prochaines transformations, pour finir par un chapitre sur le rôle de la capitale.
Ainsi, a-t-on passé « du pouvoir à l’administration », mais aussi peut-on remonter « de l’administration au pouvoir ». Si le pouvoir s’est, par la force des choses, ramifié dans les innombrables artères de l’administration, l’« action administrative, quels que soient ses privilèges, n’échappe pas à la loi du rapport des forces » ; c’est-à-dire qu’elle ne peut pas s’opposer durablement aux institutions de toute nature qui l’environnent et dont elle a finalement besoin : syndicats, notables, banques, etc. qui constituent une véritable « administration parallèle », elle-même soumise à des impératifs. L’administration devient ainsi une organisation à deux faces : elle émane du pouvoir, mais représente devant lui des intérêts locaux ou fragmentaires. Aussi est-elle en définitive l’« appareil qui a pour mission, à travers l’exécution d’une politique qui est celle d’un gouvernement, de rendre compatibles entre elles les exigences de l’opinion et les possibilités de la réalité ». Le pouvoir de l’administration dépend en dernière analyse de la plus ou moins grande autorité de l’État : elle n’a pas de doctrine propre ; ses membres ne forment pas un corps social homogène ; mais, détenant « le capital des moyens juridiques, matériels et humains du commandement, de la conception, de l’action et souvent des relations publiques », elle est bien souvent aussi « le demandeur de réforme » et en assure le « second souffle ».
On voit aisément, par ces citations, que ce livre est tout autre chose qu’une simple description du gouvernement et de l’administration de notre pays. C’est, bien plutôt, une longue réflexion nourrie de faits et d’observations sur l’ossature de notre vie politique et sociale.