Le vertige
On a tant lu de souvenirs d’années passées dans les prisons et les camps de concentration, dans les cellules d’isolement et les bagnes, dans les lieux de misère et de torture, que l’on pourrait penser que ce livre n’ajoutera rien à ce que l’on sait. L’auteur, russe communiste, épouse d’un membre influent du parti, a été victime d’une des purges staliniennes et n’a retrouvé la liberté que dix-huit ans plus tard. Elle raconte son arrestation sous un prétexte inventé, son incarcération, le simulacre du jugement qui la condamna à dix ans d’isolement cellulaire, transformés deux ans plus tard en un séjour forcé dans un camp de travail, à Kolyma, en Sibérie.
La lecture de cet ouvrage, très simplement écrit, est impressionnante. L’auteur, qui est la victime, raconte son calvaire en accumulant les détails les plus banals comme les plus horribles. Mais rien n’ébranle sa foi dans le parti auquel elle a totalement adhéré, sinon dans les hommes qui, pour un temps, le dirigent. Ce qui la soutient, c’est l’espoir qu’un jour prochain ils seront remplacés par d’autres hommes plus dignes et plus justes.
Un témoignage sur ce que coûte à une nation de se transformer rapidement en une puissance mondiale. Mais l’accès au tout premier rang ne justifie pas le mépris de la dignité et de la souffrance humaines.