Documents - Les expériences de Bikini
Les expériences qui viennent d’avoir lieu à Bikini les 1er et 24 juillet 1946 ont présenté un double caractère scientifique et militaire. Du point de vue scientifique, on pouvait dire que jusqu’au 1er juillet on ne connaissait rien de très précis sur le mécanisme de l’explosion atomique. Pas plus à Los Alamos qu’à Hiroshima ou à Nagasaki, faute d’instruments de mesures, on n’avait pu en déterminer avec rigueur les caractéristiques ni les effets dans de multiples domaines.
Par ailleurs, du point de vue militaire, il était d’un intérêt capital pour l’avenir des marines de guerre de savoir comment les cuirassés, les navires légers ou les sous-marins se comporteraient sous l’explosion. Ces deux ordres de raisons étaient donc très suffisants pour justifier les grandioses préparatifs et les énormes dépenses qui ont été consenties par le Gouvernement des U. S. A. pour la réussite de l’opération « Crossroads ».
Le but militaire des deux expériences étant, suivant l’expression de l’amiral Nimitz, de révéler les modifications à apporter aux bâtiments de guerre actuels pour leur permettre de résister aux projectiles chargés d’explosifs nucléaires, une première bombe a éclaté à quelques centaines de mètres au-dessus de l’eau pour éprouver les superstructures, tandis que la deuxième bombe, explosant à quelques mètres sous l’eau, avait pour but principal d’attaquer les coques des bâtiments. Le théâtre choisi pour l’opération « Crossroads » a été, par 10°30’ de latitude nord et 164°34’ de longitude est, l’atoll de Bikini, dans les îles Marshall, à 270 kilomètres à l’est d’Eniwetok et à 300 kilomètres au nord-ouest de Kvajalein. Bikini est un atoll corallien en forme de fer à cheval, d’une longueur de 35 kilomètres et d’une largeur de 18 kilomètres, formé d’une vingtaine de petites îles et dont le lagon constitue une magnifique rade d’environ 20 à 40 mètres de fond. Situé à 2.500 kilomètres de Guam, à 3.370 kilomètres d’Honolulu, à 6.678 kilomètres de San-Francisco et à 3.900 kilomètres de Yokohama, l’atoll ne possédait que 167 habitants indigènes, qui ont été évacués avant l’opération, avec leur roi Jeima Kemata, sur l’atoll voisin de Rongerik.
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