Bandoung, tournant de l’histoire
Le dixième anniversaire de la Conférence de Bandoung et la prochaine réunion du « second Bandoung » à Alger fournissent une bonne occasion de publier une étude sur la première manifestation collective des peuples de couleur, s’affirmant comme majeurs et capables de prendre part à la direction des affaires du monde. On peut dès maintenant saluer la date du 18 avril 1955 comme une date notable de l’histoire de notre temps. L’avenir ratifiera peut-être le jugement de l’auteur qui en fait une date capitale de l’histoire du monde. Il est encore trop tôt, nous semble-t-il, et malgré les apparences, pour porter une affirmation aussi nette.
Certes, la Conférence de Bandoung a marqué la fin de l’époque coloniale ; mais on estimera peut-être plus tard qu’elle a davantage indiqué le moment de la constatation d’un fait en grande partie accompli que celle d’une rupture avec un passé révolu. Quoi qu’il en soit des verdicts futurs sur sa signification, elle a eu une indiscutable importance pour notre génération, en excluant l’URSS des pays prolétaires, en permettant à la Chine de faire figure de chef de file, en organisant, malgré des dissensions et de larges fissures, une première et précaire entente des peuples de couleur.
Arthur Conte a profité de cet événement pour faire un tableau du monde en 1955, notamment un tableau de l’attitude des principales puissances et des principaux hommes politiques devant le fait de la décolonisation. La moitié de son livre, ou presque, y est consacrée. Le procédé est un peu systématique et long ; il eut été possible, peut-être plus frappant, de dresser une synthèse plutôt que de mener une minutieuse analyse. La seconde moitié de l’ouvrage présente les acteurs qui vont se produire sur la scène de Bandoung, raconte dans le détail la première séance et fait enfin le bilan des résultats.
C’est au total un ouvrage solide, consciencieux, un peu lourd, qui est davantage un ensemble de références qu’un véritable récit ou qu’un essai sur la signification et la portée de l’événement historique auquel il se rapporte. ♦