La baie des Cochons. L’invasion manquée de Cuba
Il y a en fait trois récits dans ce livre, trois récits qui s’enchaînent, mais forment chacun un tout. D’abord, celui de la constitution et de l’entraînement, au Nicaragua, sous l’égide de la CIA des États-Unis, de la brigade anti-castriste 2506 ; puis celui du débarquement de la baie des Cochons, le 17 avril 1961 ; enfin celui du marchandage à la suite duquel les assaillants, faits prisonniers, furent enfin relâchés, dix-huit mois après leur capture.
Ce que raconte l’auteur des conditions dans lesquelles les autorités américaines engagèrent ces Cubains à attaquer leur pays pour le libérer de l’emprise communiste est proprement aberrant et le lecteur a peine à y croire. Que des hommes aient pu être lancés dans des conditions presque improvisées, à tout le moins insuffisamment étudiées, dans une opération aussi difficile que l’est un débarquement de vive force, est un sujet d’étonnement et de stupéfaction pour ceux qui connaissent la minutie généralement apportée par les Américains dans ce genre d’affaires. Les effectifs étaient insuffisants, les renseignements sur les plages de débarquement erronés, le ravitaillement mal conçu et mal réparti sur les navires : en bref, tout semble avoir été prévu pour que cette opération échoue. Elle échoua, comme on sait, donnant prétexte à l’intervention soviétique qui, l’année suivante, allait provoquer la crise d’octobre 1962.
Haynes Johnson n’est pas avare de détails. Son livre en contient presque trop et aurait gagné à être allégé. Ceci dit, il se lit aisément, comme un reportage minutieux et très vivant, qui éclaire bien les difficultés de la politique américaine dans la région des Caraïbes où elle cherche à se maintenir et à s’implanter davantage. ♦