Mao Tsé Toung
Depuis quinze ans, Mao Tsé-Toung est à la tête d’un peuple qui, numériquement, représente le quart de l’humanité. Sa pensée a largement débordé au-delà des frontières de la Chine et les peuples sous-développés d’Asie, d’Amérique latine et d’Afrique se tournent de plus en plus vers l’exemple chinois et sont de plus en plus tentés de suivre « la voie chinoise ».
La naissance et le développement des idées de Mao ne peuvent donc pas rester indifférents, tant sur le plan strictement spéculatif que sur le plan pratique.
Dans une longue introduction, qui tient près du quart du volume, Stuart Shram expose l’évolution des idées de Mao, qui, parti d’un nationalisme traditionaliste, n’a atteint que progressivement le communisme-léniniste pour aboutir au nationalisme révolutionnaire, par son désir forcené de faire de la Chine une grande puissance moderne. Cela se manifeste par le caractère spécifiquement national des réformes entreprises, par l’affirmation de l’excellence des solutions proprement chinoises, par l’opposition qui naît et se développe contre les leaders soviétiques. L’auteur juge ainsi Mao : « Certes, cette personnalité de Mao est complexe et comporte une maîtrise de l’organisation en tant que technique politique. Mais, pour Mao, l’organisation paraît être un moyen plutôt qu’un but. On pourrait résumer la différence entre ses collègues soviétiques et lui, en disant que, si leur utopie est une utopie de la rationalité, la sienne est une utopie de la lutte. Qui plus est, si sa doctrine est collectiviste, et s’il sait exercer le pouvoir d’une façon impitoyable au besoin, il est au fond un romantique, sinon un individualiste, dans sa conception de la vie. » Et plus loin : « Il y a en lui une combinaison de Lénine et de Garibaldi – un étrange mélange de chef flamboyant et de technicien du pouvoir, comme la Chine est un étrange mélange de la Renaissance et de l’automation ».
Après cette étude serrée de la pensée de Mao, l’auteur donne de nombreux extraits de ses écrits, en les groupant suivant les sujets. Certains d’entre eux sont inédits en traduction française. Ils illustrent et confirment ce qu’a dit Stuart Shram dans son introduction.
Malgré l’austérité du sujet, le livre est d’une lecture facile. Une bibliographie critique le complète. ♦