Plaidoyer pour l’avenir
Les auteurs ont voulu donner dans ce livre « un éclairage nouveau des divers problèmes que pose la vie de l’homme en société ». Disons tout de suite qu’ils ont largement réussi dans leur propos, et que ce livre emporte l’adhésion avec une force remarquable.
S’il est banal de constater la rapidité avec laquelle le monde évolue, s’il n’est pas rare de lire que les structures suivant lesquelles nous vivons ne sont plus adaptées aux progrès de la technique et aux possibilités de la science, il est par contre beaucoup moins fréquent de voir dresser, de façon résolument optimiste, un tableau de l’avenir, à condition que les hommes consentent à comprendre qu’ils sont entrés dans une ère toute nouvelle, et déterminent en conséquence leur comportement, leurs usages et leur organisation.
Or, disent les auteurs, la plupart d’entre eux basent leur attitude sur des philosophies qui datent du siècle dernier, et se réclament de théories que les grands penseurs qui les ont élaborées ne pourraient plus soutenir, s’ils vivaient dans notre monde en rapide transformation. Les hommes commettent donc une erreur fondamentale, quelle que puisse être leur sincérité.
« La technique s’impose spontanément – aucun cocher n’a pu empêcher le triomphe de l’automobile – et elle franchit les frontières. Mais l’organisation, elle, n’est pas spontanée ». Les auteurs ajoutent plus loin : « Aujourd’hui, l’invention d’un outil enrichit moins une nation qu’une organisation permettant une bonne utilisation de cet outil ». C’est donc vers l’étude de la modification urgente de l’organisation actuelle qu’il faut s’orienter.
Cette organisation nouvelle doit s’adapter à quelques règles, notamment à celle de la « grande dimension », car le rendement des techniques modernes exige qu’elles s’appliquent sur de larges espaces et à des populations nombreuses. Mais aussi, pour être constamment au niveau de cette technique qui commande, doit-elle être souple. Nous sommes habitués à des organisations rigides, étayées sur le droit. Le monde moderne doit avoir des organisations en perpétuel devenir, et ce qui importe, c’est de « réguler » l’économie et de concevoir des structures évolutives.
Est-ce renoncer à la culture ? Certes non, répondent les auteurs. Les techniques modernes, en ayant permis l’allongement de la vie et en ayant largement soulagé le travail humain, ont amené un mieux-être et plus de justice sociale. « La technique, plus l’organisation, égale la culture ».
Le développement de la culture, rendue possible par la technique, ouvre la voie à la véritable démocratie, qui est « devant nous », et non derrière, comme on le croit trop souvent. Le rôle de l’État est de former les citoyens, et de les informer : les former aux disciplines nouvelles ; les informer des possibilités récemment acquises, de façon qu’ils soient plus capables de cultiver en eux les qualités propres aux hommes.
Et ce livre si riche et si dense se termine par une étude rapide de la position de notre pays, et conclut à la nécessité de faire au plus tôt une Europe unie.
La qualité des auteurs, dont les noms sont connus de tous, suffirait à faire prendre leurs propos en considération. La lecture de ce livre convainc rapidement qu’il contient les données essentielles d’une nouvelle et nécessaire attitude d’esprit. Tout en fournissant généreusement de larges idées, elle apporte aussi – et ce n’est pas le moindre mérite – un bain d’optimisme et de santé qui fait du bien. Souhaitons qu’après ce plaidoyer, la cause soit gagnée. ♦