Le jour le plus long (6 juin 1944)
C’est un de ces livres qu’on ne « lâche » pas avant de l’avoir terminé. L’auteur n’a pas voulu faire une œuvre historique, ni un reportage, sur le jour du débarquement allié en Normandie, en juin 1944. Il s’est efforcé de faire renaître l’atmosphère dans laquelle ont vécu les hommes qui ont accompli leur tâche, ce jour-là, de les rendre vivants, avec leurs réflexions parfois banales, parfois cocasses, parfois tragiques, et de les montrer dans mille anecdotes.
Il a évidemment fallu un travail considérable pour aboutir à ce résultat, et il est remarquable, d’autre part, d’avoir réussi à reconstituer la suite des événements de cette journée en assemblant une telle quantité de petits faits, sans aboutir à créer une confusion complète dans l’esprit du lecteur. Sans doute, pour tirer un réel profit d’un tel livre, faut-il que ce lecteur connaisse, au moins dans leurs grandes lignes, le plan allié et la forme de la défense allemande ; à ce propos, on suggérerait volontiers que les prochaines éditions de cet ouvrage, assez court en somme, soient augmentées, pour les jeunes lecteurs, d’un précis du débarquement, qui permettrait de mieux situer les différentes actions. Mais, à cette réserve près, on peut assurer que ce livre est un témoignage précieux et objectif de la guerre, telle que la voient les combattants de première ligne, la guerre avec ses moments d’exaltation, de fatigue, d’incompréhension, avec ses hasards, ses rencontres inattendues, ses impressions violentes qui se succèdent sans qu’une pleine conscience en soit prise sur le moment.
Cornélius Ryan assista lui-même au Débarquement. Mais, pour écrire ce livre, il a minutieusement interrogé trois mille personnes de toutes catégories : combattants du rang, officiers d’état-major, généraux, civils français de la Résistance. L’accumulation des témoignages lui a permis de reconstituer des scènes de détail, qui donnent à son œuvre sa haute valeur humaine.
Un tel livre méritera d’être lu par les techniciens qui se pencheront sur l’histoire du Débarquement. Au-delà des plans, des conceptions, des ordres, il leur donnera la possibilité de se rendre compte de la transposition des travaux d’état-major dans la pâte humaine, grouillante et souffrante. ♦