Histoire de l’armée soviétique
Les deux tiers de cet ouvrage sont consacrés à l’histoire de l’armée soviétique, mais le dernier tiers est une analyse détaillée de ce que cette armée représente en 1958. Sans doute, ces deux parties se complètent-elles et s’éclairent-elles mutuellement ; elles procèdent cependant de préoccupations d’ordre différent. Le lecteur se trouve donc placé devant une option : ou admettre que l’historique n’est qu’une longue et pertinente introduction au jugement porté sur l’armée soviétique actuelle ; ou estimer que la description détaillée de celle-ci n’est qu’une illustration d’un moment d’une histoire qui continue de se dérouler. L’une et l’autre de ces deux attitudes se justifient pleinement suivant ce que l’on recherche dans cet ouvrage, dont nous faisons ainsi apparaître la richesse et l’intérêt.
L’Armée soviétique est une puissance : on ne prête qu’aux riches ; aussi, dans l’imagination de nombreux Occidentaux, cette puissance devient-elle aisément une toute-puissance. Et ainsi se trouve rempli le rôle d’épouvantail qui est le premier de ceux que le parti attribue aux forces armées.
C’est contre cette peur irraisonnée de la force russe que Michel Garder met ses lecteurs en garde. Il montre, dans l’histoire pleine de péripéties, souvent dramatiques, d’une armée qui n’a que quelques dizaines d’années d’existence, les faiblesses congénitales ou accidentelles qui lui viennent de sa double ascendance : l’armée des Tsars et l’armée de la Révolution. Il souligne, de façon fort démonstrative, combien les purges de 1937, puis les coups portés par les Allemands en 1941 et 1942, la mirent en péril de mort. Il indique enfin à quel point les crises politiques internes peuvent compromettre sa solidité et son efficacité. L’armée soviétique, écrit-il, est l’armée du Parti. On peut en conclure que sa force dépend de la mesure dans laquelle le Parti s’identifiera avec les buts profondément nationaux.
Mais, si Michel Garder a raison de vouloir détruire un mythe ; il s’en faut de beaucoup cependant qu’il ne reconnaisse pas les éléments de puissance de l’armée russe ; il en fait en conséquence un tableau complexe, comme l’est obligatoirement celui de tout organisme vivant.
Cet ouvrage fournit au grand public – et sans doute pour la première fois en France – une information à jour, suffisamment complète pour qu’un lecteur, désireux de se renseigner sur une question dont l’importance n’a pas besoin d’être soulignée, puisse se faire une idée exacte. C’est pourquoi nous en recommandons la lecture. ♦