La condition humaine en Chine communiste
Au lieu de procéder comme de nombreux hommes politiques et journalistes qui, pour avoir des renseignements sur la vie sous le régime de Mao, se sont rendus en Chine communiste, Suzanne Labin a interrogé cinquante-quatre réfugiés, venus à Hong-Kong pour fuir le continent rouge.
Ciquante-quatre, sur quatre millions de réfugiés, dont un peu moins de la moitié à Hong-Kong, c’est peu, pourra-t-on penser. Mais l’auteur les a choisis parmi les éléments représentatifs des différentes catégories sociales, et a étayé leurs déclarations sur de nombreux documents. On peut donc estimer que cette enquête a une valeur certaine.
Elle est un réquisitoire contre le régime communiste, et démasque les mensonges et les hypocrisies de la propagande officielle faite par Pékin. Qu’il s’agisse de « petites gens », de lettrés, d’hommes, de femmes, d’anciens militants du parti brûlant ce qu’ils ont adoré, le ton est uniformément celui d’une révolte contre l’enrégimentement de l’individu, la disparition des libertés les plus élémentaires, l’inquisition permanente au plus profond de la vie privée, la constitution d’une nouvelle classe, celle des dirigeants, à laquelle vont tous les avantages.
Le livre se termine par des chapitres consacrés à une conversation entre l’auteur et un laudateur du régime communiste, et à la situation de la Chine communiste dans le monde. Suzanne Labin estime que les Chinois sont à la remorque des Russes, que « Pékin est vissé à Moscou », et que toutes les prévisions d’une rupture entre les deux grands pays communistes sont, pour le proche avenir du moins, de pures rêveries.
La lecture de ce livre est assez longue ; les déclarations des réfugiés se répètent souvent. Peut-être aurait-il été préférable de condenser davantage ; le lecteur se trouve plus en présence d’une documentation abondante, que devant une opinion étayée d’exemples. Cet ouvrage est une contrepartie souvent passionnée, aux nombreux livres dans lesquels des Occidentaux, et non des moindres, ont fait part de leurs impressions favorables sur la Chine communiste. Il est probable que l’enquête de Suzanne Labin ne convaincra que ceux qui sont déjà convaincus ; c’est le sort des travaux de ce genre. Il n’en reste pas moins qu’elle était nécessaire parce qu’elle donne la parole à des témoins et que l’auteur étaye ses accusations sur des faits vécus. ♦