Les généraux contre Hitler : le 20 juillet à Paris
Ce livre évoque la grande conspiration des généraux allemands en 1944 ou plus précisément des chefs de l’armée allemande en France. Dès 1943, de nombreux généraux s’étaient convaincus que Hitler conduisait leur patrie à la ruine et qu’il fallait ou l’arrêter ou le tuer et négocier avec les Alliés de l’Ouest.
Telle était la conviction du général Heinrich von Stulpnagel, gouverneur militaire en France. Ce soldat que l’auteur dépeint comme un partisan résolu d’une entente avec les Français dont il tenta à maintes reprises d’adoucir le sort, prit contact avec le maréchal Rundstedt, le général von Falkenhausen, le maréchal Rommel et maints officiers supérieurs, dont von Kluge qui succéda à Rundstedt comme chef des troupes de l’Ouest au début de juillet 1944. C’est à ce moment qu’on décida de passer à l’action, en liaison avec le groupe de conjurés de Berlin qui devait abattre Hitler et s’emparer du pouvoir.
L’aventure tient tout entière dans cette journée du 20 juillet que l’auteur retrace heure par heure. Des coups de téléphone donnés le matin de Berlin firent croire que le complot avait réussi et que le Führer avait été tué. Les entretiens qui se poursuivirent en France pendant toute la journée sont restitués ici par les témoignages les plus directs et c’est au cours de l’un d’entre eux que Stulpnagel donna des ordres pour que, dans la nuit, les chefs SS fussent arrêtés ainsi que les 1 400 hommes dont ils disposaient directement.
Le plan fut exécuté à la lettre et un armistice avec les alliés aurait été rapidement signé si le maréchal von Kluge, ayant appris dans la soirée du 20 que Hitler avait échappé à l’attentat, ne s’était soudain retiré de la conspiration. Sa décision fut prise au cours d’une ultime réunion à La Roche-Guyon, mais à ce moment les arrestations des SS à Paris avaient commencé et l’on ne pouvait arrêter l’exécution des ordres.
À l’aube du 21 les conjurés étaient donc perdus. L’attitude de von Kluge ne leur permettait pas de continuer la lutte et ils étaient déjà désignés pour le supplice. Pourtant, comme dans une tragédie classique, il y eut une pause, une lueur d’espoir, car, sous l’impulsion d’Abetz, les SS et la Wehrmacht, pour éviter le pire, se réconcilièrent et tâchèrent de convaincre Berlin qu’il n’y avait eu, au cours de la nuit, qu’une suite d’erreurs. Mais les dirigeants de la Gestapo ne furent pas dupes et poussèrent leur enquête.
Le résultat ? Stulpnagel, convoqué à Berlin, se tira une balle dans la tête près de Verdun, mais il ne réussit qu’à se rendre aveugle et fut pendu à un croc de boucher. Pendus aussi les colonels qui l’avaient secondé : von Kluge, lui, essaya vainement de se faire tuer sur le front de Normandie et se suicida [le 18 août]. Rommel fut contraint au suicide [le 14 octobre].
Conduisant le lecteur tour à tour sur le front, au Majestic, dans les grands états-majors et enfin au « tribunal populaire » de Berlin, ce récit d’une sobriété et d’une précision saisissantes tient constamment le lecteur en haleine. Il est bien fait pour nous convaincre que si la conspiration du 20 juillet avait réussi, la fin de la guerre et sans doute l’après-guerre auraient revêtu un tout autre aspect.
L’auteur qui se trouvait à l’état-major de Stulpnagel a vu le drame ; il a bien connu tous ses acteurs, et il a consacré plusieurs années à l’étude de tous les rapports, témoignages, journaux privés capables de restituer dans leur vérité la journée décisive elle-même, son prologue et ses suites. ♦