Histoire de l’Afrique des origines à nos jours
Dans la bibliothèque historique des éditions Payot, une remarquable synthèse de l’histoire de l’Afrique des origines à nos jours vient de paraître.
Vouloir présenter en un volume l’histoire complète du continent africain peut paraître a priori une gageure et pourtant l’auteur tient ses promesses.
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La première partie du volume décrit l’Afrique avant les Européens. Après un premier chapitre consacré à la Préhistoire, l’Afrique de l’Antiquité rappelle les souvenirs de l’ancienne Égypte, de Carthage et des provinces romaines. Jusqu’à cette période, seule l’histoire de l’Afrique du Nord est convenablement connue.
L’Islam vient alors recouvrir une grande partie de l’Afrique. Utilisant avec un égal bonheur le sabre, le Coran et le commerce, les musulmans occupent la moitié septentrionale et orientale du continent africain, car si la conquête spirituelle des populations autochtones de l’Afrique du Nord (au sens le plus large du terme) est le fait de guerriers et de pillards, l’implantation arabe en Afrique orientale (y compris Madagascar) est le fait exclusif des marchands, et « l’histoire de l’Afrique noire, avant les documents européens, doit beaucoup aux chroniqueurs arabes ».
Enfin, dans un chapitre remarquable, l’auteur nous rend assimilable l’histoire des innombrables groupements humains, qui se partageaient l’Afrique noire, avant l’arrivée des Européens.
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« Les Européens en Afrique », tel pourrait être le titre d’une seconde partie, qui, des premières reconnaissances côtières nous mène à la Première Guerre mondiale.
« Au Moyen-Âge, l’expansion européenne est arrêtée, sur terre, par les forces de l’Islam et, sur mer, par l’insuffisance des moyens de navigation. Cette expansion ne put avoir lieu qu’aux XVe et au XVIe siècles, lorsque l’Islam fut rejeté d’Espagne et qu’en même temps, le génie maritime mit au point la caravelle. Dès lors, s’ouvre l’ère des négriers et des comptoirs. Seuls, des points de la côte sont occupés par des pays européens intéressés par les produits, qui ont donné leurs noms aux secteurs côtiers (Côte de l’Or, Côte d’Ivoire, Côte des Graines…) et qui représentent, par ailleurs, autant d’escales sur la route des Indes. »
Il faudra attendre le XIXe siècle pour que la reconnaissance complète de l’Afrique soit assurée par de nombreux explorateurs dont la plupart ont légué leurs noms à la postérité.
À la veille de la Première Guerre mondiale, l’Afrique est bien reconnue, tout au moins dans le domaine physique, car l’exploration ethnographique, sociale, linguistique, humaine n’en est qu’à ses débuts. Bien que certaines Nations européennes soient insatisfaites, l’Afrique est partagée : « les jeux sont faits ».
L’auteur termine cette partie de son ouvrage par un exposé des différentes méthodes coloniales, européennes en Afrique et, bien qu’il s’en défende, il en dresse un véritable catalogue faisant ainsi ressortir la part non négligeable de son caractère national que chaque nation d’Europe met dans son œuvre de colonisation.
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Les deux chapitres, particulièrement denses, qui terminent cette étude nous conduisent jusqu’aux événements récents, qui ont pour cadre l’Afrique – l’Afrique du Nord en particulier.
Malgré un anticolonialisme d’une rare violence, qui s’est manifesté en avril 1955 à Bandœng, l’auteur pense que les jeunes peuples d’Afrique prennent conscience de « leurs problèmes particuliers et des possibilités que leur offrent les diverses formules d’association avec les Nations de la vieille Europe, de la jeune Amérique ou d’une Asie en plein essor ».
Les formules de l’Union française et du Commonwealth sont des variantes nationales des modes d’association futurs entre l’Europe et l’Afrique.
Et l’auteur de conclure :
« En quelques décades, l’efficacité européenne a radicalement transformé l’Afrique… L’essor minier, le potentiel hydroélectrique font de ce continent le complément naturel de l’Europe… Le développement de l’Afrique est en marche dans des conditions que la routine de l’entre-deux-guerres ne pouvait laisser prévoir… Sur le plan politique l’ère coloniale s’achève… »
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« Le monde a les yeux fixés sur l’Afrique »… écrit l’éditeur sur la bande de présentation de cet ouvrage. Les événements les plus récents viennent corroborer cette légende et justifier amplement l’intérêt que l’Europe porte à ce continent.
L’auteur, qui est administrateur de la France d’outre-mer, parle en véritable spécialiste des problèmes de l’Afrique noire ; il est vraisemblable que son ouvrage lui vaudra quelques critiques de la part des lecteurs avertis des questions de l’Afrique du Nord. Il n’en reste pas moins, cependant, qu’il a su réaliser un ouvrage intéressant – passionnant même – et s’il nous promène un peu rapidement – suivant ses propres termes – des navires du suffète Hannon aux blindés de Rommel, des ruines de Zimbabwe à René Caillé… nous lui sommes reconnaissant de nous avoir fait parcourir, en quelque quatre cents pages seulement, l’essentiel de l’histoire de ce continent africain, encore si peu connu. ♦