Les mécanismes de formation et de prise de décision au Japon sont profondément différents des nôtres. L'oublier, c'est s'exposer à de graves mécomptes dans nos relations avec ce pays, ou dans l'analyse de sa politique extérieure. L'auteur vient de passer quelques années au Japon et tire ici les enseignements de ses expériences.
Japon : modes de décision et relations extérieures
Le jour de mon arrivée au Japon, le ministre des Finances alla rendre visite au Premier ministre et déclara à l’issue de l’audience qu’il apporterait à celui-ci son entier soutien dans la discussion budgétaire. Peu de temps après, un jeune diplomate japonais m’affirma tout simplement que tel engagement du Premier ministre avait été pris sans l’accord du ministère des Affaires étrangères et n’avait donc, de ce fait, aucune chance d’être mis en œuvre (ce qui se vérifia). Le nouveau ministre de l’Industrie et du Commerce extérieur pour sa part, faisait lors de sa nomination, des déclarations quelque peu surprenantes sur le thème : « le Japon devrait cesser de faire des concessions dans sa guerre commerciale avec les États-Unis et l’Europe, car il en a déjà fait suffisamment lors de la guerre du Pacifique… » ; ses fonctionnaires m’assurèrent que de tels propos, tenus sous l’emprise de l’émotion, n’engageaient personne et n’annonçaient point de changement de politique : le ministre n’y connaissait rien, on allait lui expliquer les choses et l’incident n’aurait pas de suite. Tel fut bien le cas.
Ces trois anecdotes suffiraient à montrer que les mécanismes de la prise de décision dans le système politico-administratif japonais obéissent à des règles qui n’ont que peu de rapport avec celles que nous connaissons en Occident et notamment en France.
La particularité la plus marquante est constituée par le fait que la décision s’élabore de bas en haut, par consultation et accord de l’ensemble des personnes compétentes ou concernées.
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